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Page:Encyclopédie méthodique - Physique, T1.djvu/390

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AUR

l’effet d’une illuſion d’optique. Néanmoins la beauté & la magnificence des aurores boréales seront encore aſſez grandes, quoique les illuſions d’optiques lui en faſſent perdre une partie ; elles en aſſurent même l’éclat & la ſplendeur, puiſque les illuſions ſuppoſent néceſſairement une grande réalité, je veux dire, une grande intenſité dans la cauſe qui eſt miſe en action.

Des présages des aurores boréales, & de leur influence ſur l’aiguille aimantée. On ſent bien que par ce titre il ne peut être, en aucune manière, queſtion des événemens politiques qu’on a cru trop long-temps avoir été annoncés par les aurores boréales ; ces temps d’ignorance & de ſuperſtition ne ſont plus ; les lumières que les ſciences & que la phyſique, en particulier, répandent, ont diſſipé à jamais ces vains préjugés. Il ne s’agit ici que des préſages relatifs à la température, qu’on peut tirer des aurores boréales ; par exemple, de ſavoir ſi elles ſont les précurſeurs des ouragans, ainſi que le penſe M. le Monnier, de l’académie des ſciences de Paris, dans ſes lois du magnétiſme, page 117 ; ſi elles annoncent un temps froid & pluvieux, comme l’a pensé l’abbé Hell, ou un temps doux & ſerein, ſelon l’opinion de quelques-uns : entrons dans quelque détail.

Toutes les apparitions de l’aurore boréale, obſervées par Gaſſendi, trois en ſeptembre, une en avril & la cinquième en février, ont été ſuivies, ainſi qu’il le témoigne par des jours doux & ſereins. Kirkius, dans l’obſervation qu’il fit à Berlin, le 6 mars 1707, dit que l’aurore boréale fut accompagnée de beau temps, & qu’il dégeloit pendant le jour. M. Maraldi dit auſſi que le 11, 12 & le 13 avril 1716, jours où il obſerva des aurores boréales, l’air fut doux, & même chaud, ainſi qu’il arriva le 17 mars de la même année, en Angleterre, où cette lumière avoit été apperçue ; l’air fut encore très-doux à Paris, le 15 & le 16 décembre 1716 ; & les 6, 9, & 11 janvier 1717, contre l’ordinaire de la ſaiſon. Il paroît donc, dit le ſavant, qu’on vient de citer, que l’apparition de ces aurores boréales a été accompagnée d’un air doux & tempéré, même en hiver & en des climats froids, ce qui donne lieu de croire que ces lumières ont été cauſées par des exhalaiſons ſubtiles & ſulphureuſes qui, s’étant élevées de la terre & allumées dans l’air, ont contribué à le rendre doux. Mém. de l’acad. des ſciences, 1717, pag. 30. Cette explication étoit digne de la phyſique de ce temps. M. Roëmer, dans les Mémoires de l’académie de Berlin, à l’occaſion des trois aurores boréales, faites à Copenhague, aux mois de février & de mars 1707, remarque que ces phénomènes ſont plutôt une marque de l’état préſent de l’air, que de ce qui doit les ſuivre, & qu’il n’arrive pas toujours, comme quelques-uns le croient, qu’en été ce phénomène ſoit ſuivi par un beau temps, & en hiver par le froid, &c. Il ſcroit facile de multiplier ici des témoignages de ce genre, donnés par divers auteurs ; en les comparant, on verroit qu’on ne peut rien en conclure, parce qu’il n’y a aucune uniformité dans les réſultats.

À peine eut-on obſervé un petit nombre de fois l’aurore boréale, comme le fit Gaſſendi en 1621 & l’année ſuivante, qu’on se hâta d’aſſurer que les circonſtances qui accompagnoient ce phénomène, devoient ſe trouver dans toutes les apparitions. On crut long-temps, par exemple, que ce brillant ſpectacle ne paroiſſoit qu’en l’abſence de la lune, & lorſque le temps étoit ſerein, parce que les premières obſervations avoient été faites dans ces circonſtances, &c. C’eſt ainſi que l’eſprit humain, naturellement porté à anticiper sur les âges à venir, s’eſt toujours, pour ainſi dire, preſſé de bâtir des ſyſtêmes précoces, tandis qu’il ne falloit que ramaſſer des matériaux pour la poſtérité. Auſſi des obſervations ſouvent répétées depuis ces premiers temps, nous ont-elles appris que l’aurore boréale pouvoit paroître, malgré la clarté de la lune, & même dans des temps de pluie. Elles nous ont appris que les aurores boréales ont paru dans diverſes températures de chaud ou de froid, de ſéchereſſe ou d’humidité, de vent ou de calme, de beau ou de mauvais temps, &c. &c., & que l’état du temps qui les précède ou qui les accompagne, eſt toujours & par-tout, auſſi différent que l’état du temps qui les ſuit. Ainſi, elles ne peuvent point préſager quelle ſera la température qui aura lieu après leur apparition ; & aucune température ne peut les annoncer, je ne dis pas avec certitude, mais même avec quelque probabilité.

Le mot de préſage, pouvant être pris dans un ſens actif ou paſſif, il ne ſera pas hors de propos d’examiner ici s’il n’y a pas d’autre phénomène qui puiſſe ſervir à prédire les aurores boréales ; il eſt bien évident à tous ceux qui réfléchiſſent ſur les cauſes & les effets des phénomènes de la nature, que cette queſtion ne peut être déterminée que par une ſuite d’obſervations ſemblables faites en divers temps & en différens pays, & que ſi on a remarqué conſtamment quelque phénomène précéder les aurores boréales, on pourra conclure qu’il en eſt un préſage, qu’il en eſt un ſigne précurſeur.

Or, un aſſez grand nombre d’obſervations, faites par divers savans, prouvent qu’une certaine agitation, dans l’aiguille aimantée bien ſuſpendue, ſe fait ſouvent remarquer avant l’apparition des aurores boréales.

Les premières obſervations qu’on ait faites dans ce genre remontent à l’année 1741 ; depuis le mois de mars de cette année, juſqu’en janvier 1747, on a remarqué que différentes aurores boréales, obſervées à Upſal, par M. Wargentin, &

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