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3 degrés de hauteur, duquel il ſortoit vers le nord-eſt 8 ou dix lumières de 7 à 8 degrés de hauteur environ, ſur 2 degrés à-peu-près de largeur & ayant tous les mêmes mouvemens.

Le 11 février 1720, M. Maraldi obſerva une aurore boréale à Paris ; le chevalier de Louville la vit à Orléans ; le réſultat de ces deux obſervations fut que c’étoit un grand arc lumineux, dont le ſommet étoit préciſément au nord, élevé ſur l’horiſon de 6 degrés, & dont les deux moitiés, aſſez égales, s’étendoient de-là à chacune à 50 ou 55 degrés juſqu’à l’horiſon qu’elles ſembloient couper. Tout le ſegment du cercle compris dans l’arc, étoit lumineux, & à tel point, que les corps qui y étoient expoſés, jetoient une ombre ſenſible. Cependant cette lumière étoit ſi déliée, que l’on voyoit aiſément au travers les étoiles de la 3me grandeur.

De temps en temps il s’élevoit de cet arc des colonnes de lumière perpendiculaires qui duroient quelques ſecondes, & ſouvent pluſieurs enſemble. Quelquefois le haut de l’arc étoit crénelé par ces feux paſſagers, qui enſuite s’éteignoient ; l’arc ſe diviſa quelquefois en pluſieurs arcs plus petits, qui ſe diſſipoient, & enſuite il en renaiſſoit d’autres pareils. Les nuages qui pouvoient ſe mêler diverſement à cette lumière, changeoient auſſi les différentes apparences qu’elle auroit eues naturellement, & en varioit encore le jeu ; M. Maraldi obſerva qu’elle s’augmenta pendant 2 heures, & s’éleva ſur l’horiſon jusſqu’à plus de 35 degrés, après quoi elle diminua & s’abaiſſa pendant un temps égal. Hiſt. de l’acad., 1720, pag. 4.

M. de Maupertuis, dans la relation de ſon voyage au nord, décrit en cette ſorte les aurores boréales qui paroiſſent l’hiver en Laponie. « Si la terre eſt horrible alors dans ces climats, le ciel préſente aux yeux les plus charmans ſpectacles. Dès que les nuits commencent à être obſcures, des feux de mille couleurs & de mille figures éclairent le ciel, & ſemblent vouloir dédommager cette terre, accoutumée à être éclairée continuellement, de l’abſence du ſoleil qui la quitte. Ces feux dans ces pays n’ont point de ſituation conſtante comme dans nos pays méridionaux. Quoiqu’on voie ſouvent un arc d’une lumière fixe vers le nord, ils ſemblent cependant le plus ſouvent occuper indifféremment tout le ciel. Ils commencent quelquefois par former une grande écharpe d’une lumière claire & mobile, qui a ſes extrémités dans l’horiſon & qui parcourt rapidement les cieux, par un mouvement ſemblable à celui du filet des pêcheurs ; conſervant dans ce mouvement aſſez ſenſiblement la direction perpendiculaire au méridien. Le plus ſouvent après ces préludes, toutes ces lumières viennent ſe réunir vers le zénith, où elles forment le ſommet d’une eſpèce de couronne. Souvent des arcs ſemblables à ceux que nous voyons en France, vers le nord, ſe trouvent ſitués vers le midi ; ſouvent il s’en trouve vers le nord & vers le midi tout enſemble : leurs ſommets s’approchent, pendant que leurs extrémités s’éloignent en deſcendant vers l’horiſon. J’en ai vu d’ainſi oppoſés, dont les ſommets ſe touchoient preſqu’au zénith ; les uns & les autres ont ſouvent au-delà pluſieurs arcs concentriques. Ils ont tous leurs ſommets vers la direction du méridien, avec cependant quelque déclinaiſon occidentale, qui ne paroît pas toujours la même, & qui eſt quelquefois inſensible. Quelques-uns de ces arcs, après avoir eu leur plus grande largeur au-deſſus de l’horiſon, ſe reſſerrent en s’approchant, & forment au-deſſus plus de la moitié d’une grande ellipſe. On ne finiroit pas, ſi l’on vouloit dire toutes les figures que prennent ces lumières, ni tous les mouvemens qui les agitent. Leur mouvement le plus ordinaire, les fait reſſembler à des drapeaux qu’on feroit voltiger dans l’air ; & par les nuances des couleurs dont elles ſont teintes, on les prendroit pour de vaſtes bandes de ces taffetas que nous appelons flambés. Quelquefois elles tapiſſent d’écarlate quelques endroits du ciel. » M. de Maupertuis vit un jour à Ofwer-Tornea (c’étoit le 18 décembre 1736) un ſpectacle de cette eſpèce, qui attira ſon admiration, malgré tous ceux auxquels il étoit acoutumé. On voyoit vers le midi une grande région du ciel teinte d’un rouge ſi vif, qu’il ſembloit que toute la conſtellation d’Orion fût trempée dans du ſang. Cette lumière fixe d’abord, devint bientôt mobile ; & après avoir pris d’autres couleurs de violet & de bleu, elle forma un dôme dont le ſommet étoit peu éloigné du zénith vers le ſud-oueſt ; le plus beau clair de lune n’effaçoit rien de ce ſpectacle. M. de Maupertuis ajoute qu’il n’a vu que deux de ces lumières rouges, qui ſont rares dans ce pays, où il y en a de tant de couleurs, & qu’on les y craint comme le ſigne de quelque grand malheur. Enfin, lorſqu’on voit ces phénomènes, on ne peut s’étonner que ceux qui les regardent avec d’autres yeux que les philoſophes, y voyent des chars enflammés, des armées combattantes, & mille autres prodiges.

Le même ſavant dont nous venons de citer ce paſſage, a donné, dans les Mémoires de l’académie de 1733, la ſolution très-élégante d’un probléme géométrique ſur l’aurore boréale.

Le 19 février 1771, il y eut une aurore boréale ſans jets de lumière, ni rayons ; elle commença à ſix heures & un quart du ſoir, & conſiſtoit en une lumière blanchâtre, élevée de 10 degrés au-deſſus de l’horiſon ; la partie du ciel qui le touchoit étoit obſcure & enfumée ; il y eut une lumière zodiacale au couchant. Le 20, l’aurore boréale parut encore ſans jets, ni rayons, & à la même heure que la veille ; mais elle étoit plus belle que la précédente ; en ce que la lumière étoit double, dit le P. Coſte, & formait deux cintres ſéparés, par une zone d’environ 3 degrés de largeur, plus obſcure et enfumée, comme la partie inférieure du