Page:Encyclopédie méthodique - Physique, T1.djvu/429

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vient fixe à ſon tour ; enfin, elles découvriront une infinité de combinaiſons mécaniques. Toute cette machine joue ſans qu’on y touche, quand on l’a montée une fois. On oublioit de dire que l’animal boit, barbotte dans l’eau, croaſſe comme le canard naturel ; enfin, l’auteur a tâché de lui faire produire tous les geſtes d’après ceux de l’animal vivant, qu’il a conſidéré avec attention.

Après que ces automates eurent fait en France l’admiration de la capitale & de pluſieurs provinces, on les tranſporta en Angleterre & enſuite en Allemagne. Depuis long-temps on ignoroit ce qu’ils étoient devenus, & ce n’est qu’en 1787 environ qu’on a été inſtruit de leur ſort. On en a l’obligation à M. Nicolaï ; cet auteur s’exprime ainſi dans son voyage allemand de Berlin en Allemagne & en Suiſſe : « Où croyez-vous qu’il faille chercher le flûteur automate, le canard artificiel & le provençal, de feu M. Vaucanſon ? à Nuremberg, dans le comptoir de la maiſon Pfluger, & dans des caiſſes qui n’ont point été ouvertes depuis long-temps. La deſtinée de ces trois chefs d’œuvres eſt trop ſingulière pour ne pas chercher à ſatiſfaire la curioſité des lecteurs.

Vaucanſon fit voir ces automates à Paris, vers Pâques, en 1738, après avoir été admirés dans le reste de la France & en Angleterre, je ne ſais par quel haſard, ils tombèrent entre les mains d’un certain Dumoulin, orfèvre de profeſſion, mais mécanicien par goût, il paſſa avec ces figures en Allemagne, où il les montra pour de l’argent. En 1752 ou 1753, il étoit à Nuremberg ; il cherchoit à s’en défaire, & les offrit en 1754, au margrave de Bareilli ; mais le marché ne fut pas conclu. Dumoulin, qui s’étoit endetté, alla en 1755 à Pétersbourg, comptant pouvoir y vendre avantageusement ses automates, qu’il avoit laiſſés, en attendant, bien empaquetés, à Nuremberg, pour ſervir de caution à ſes créanciers ; il ne les vendit point, il fut nommé maître des machines à Moſcou où il eſt mort en 1765. Depuis ce temps, les figures ſont reſtées chez le banquier, dans l’état où il les avoit laiſſées. On en a fait aucun uſage ; & on vouloit les livrer au premier qui auroit rembourſé à ce comptoir trois mille florins, ſomme à laquelle ſe montoient les avances faites pour Dumoulin

4o. M. de Vaucanſon avoit encore imaginé un automate fabricant, propre à faire des pièces d’étoffes de ſoie, en ſatin ou en taffetas de la meilleure qualité & de la plus grande perfection. Tout le mécaniſme y étoit à découvert ; on voyoit le jeu des liſtes qui ouvroient la chaîne, le mouvement alternatif de la navette qui couchoit la trame, celui du peigne qui frappoit l’étoffe, le mouvement du rouleau ſur lequel ſe plioit l’étoffe, à meſure qu’elle ſe fabriquoit ; enfin, tous les léviers, toutes les courbes, toutes les cordes qui produiſoient les mouvemens étoient mis en jeu par un moteur. Il n’y avoit qu’une femme pour rénouer les fils qui ſe caſſoient par fois, & après les avoir raccommodés, elle retiroit le bouton, & le métier reprenoit ſon jeu. Le moteur que M. de Vaucanſon avoit employé dans cette occaſion, étoit un âne qui, attelé à un cabeſtan, tournoit, en ſe ſervant de poids et de reſſorts, l’effet eût été le même.

L’année ſuivante, M. de Vaucanſon parvint à faire fabriquer, par ſon automate ou par ſa machine, des étoffes façonnés. Le moyen qu’il employa alors pour faire exécuter des fleurs ſur ſon étoffe étoit très-ingénieux. Le métier, alloit, en quelque ſorte, ſans ſecours étranger. L’âne, en marchant ſeulement, donnoit le mouvement à la machine. Tout le monde pu voir les reſſorts de la machine, examiner la combinaiſon des différentes pièces, et en considérer le jeu depuis le premier juſqu’aux derniers mobile. Voyez la notice hiſtorique de M. Vaucanson, on y lira que cet ingénieux mécanicien avoit encore imaginé de conſtruire un automate, dans lequel devoit s’opérer tout le mécaniſme de la circulation du ſang.

5o. On peut rapporter aux automates le tableau mouvant du père Sébaſtien Truchet, de Lyon. Ce célèbre mécanicien avoit fait un tableau mouvant qui repréſentoit un opéra en cinq actes ; on y voyoit un très-grand nombre de figures qui repréſentoient des drames complets, des pièces pantomimes, comme on l’a vu depuis ſur nos grands théâtres, et qui exprimoient, par leurs geſtes et leurs mouvemens, toutes les actions relatives à l’objet qu’on avoit voulu mettre en ſcène. Ce qui augmentoit les difficultés de l’exécution, c’eſt que, à chaque acte, il y avoit des changemens de décoration, que les figures étoient très-petites et que la machine entière n’avoit que ſeize pouces quatre lignes de longueur sur treize pouces quatre lignes de hauteur, et un pouce trois lignes d’épaiſſeur.

6o. Le concert mécanique de M. Richard mérite d’être cité ; il fit voir à Paris, au commencement de l’année 1771, quatre figures automates de grandeur naturelle, qui exécutoient un concert. La première étoit celle d’une jeune muſicienne aſſiſe, qui touchoit du clavecin & de l’orgue enſemble & ſéparément, & s’accompagnoit auſſi de temps en temps de la voix. Elle étoit accompagnée par deux autres automates, dont l’un repréſentoit un jeune homme, debout ; qui jouoit du violon, et l’autre perſonnage jouoit de la baſſe ; mais tous les deux tiroient eux-mêmes de leurs inſtrumens des ſons par le mouvement de l’archet & des doigts. Un amour qui imitoit parfaitement la nature, étoit placé debout derrière un pupitre, battoit la meſure, et tournoit à propos les feuillets.

Enſuite, on voyoit un jeune berger automate, jouant de la flûte, il étoit accompagné du chant de deux oiſeaux ; on y voyoit encore, dans une cage, un ſerin artificiel qui ſiffloit pluſieurs airs & imitoit parfaitement les mouvemens et la voix de ces petits animaux, comme les grandes figures automates