Page:Encyclopédie méthodique - Physique, T1.djvu/456

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
14.*
BAL

poids connu, pour que les deux poids ſe tiennent l’un l’autre en équilibre ; & par conſéquent le poids connu fait connoître la valeur du poids inconnu.

Car comme la balance, figure 215, eſt un vrai levier, ſa propriété eſt la même que celle du levier ; ſavoir, que les poids qui y ſont ſuſpendus, doivent être en raiſon inverſe de leurs diſtances à l’appui, pour être en équilibre. Mais cette propriété du levier, que l’expérience nous manifeſte, n’eſt peut-être pas une choſe facile à démontrer en toute rigueur. Il en eſt à peu près de ce principe comme de celui de l’équilibre ; on ne voit l’équilibre de deux corps avec toute la clarté poſſible, que lorſque les deux corps ſont égaux, & qu’ils tendent à ſe mouvoir en ſens contraires avec des vîteſſes égales. Car alors il n’y a point de raiſon pour que l’un ſe meuve plutôt que l’autre ; & ſi l’on veut démontrer rigoureuſement l’équilibre, lorſque les deux corps ſont inégaux, & tendent à ſe mouvoir en ſens contraire avec des vîteſſes qui ſoient en raiſon inverſe de leurs maſſes, on eſt obligé de rappeler ce cas au premier, où les maſſes & les vîteſſes ſont égales ; de même on ne voit bien clairement l’équilibre dans la balance, que quand les bras en ſont égaux & chargés de poids égaux. La meilleure manière de démontrer l’équilibre dans les autres cas, eſt peut-être de les ramener à ce premier, ſimple & évident par lui-même. C’eſt ce qu’a fait Newton dans le premier livre de ſes Principes, ſect. 1ere.

Soient, dit-il, figure 216, O K, O L, des bras de leviers inégaux, auxquels ſoient ſuſpendus les poids Α, B ; ſoit fait O D = à O L, le plus grand des bras, la difficulté ſe réduit à démontrer que les poids d, P, attachés au levier L O D, ſont en équilibre. Il faut pour cela que le poids P ſoit égal à la partie du poids Α, qui agit ſuivant la ligne D C perpendiculaire à O D ; car les bras O L, O D étant égaux, il faut que les forces qui tendent à les mouvoirs ſoient égales, pour qu’il y ait équilibre. Or, l’action du poids Α, ſuivant D C, eſt au poids Α, comme D C à D Α, c’eſt-à-dire, comme O K à O D. Donc la force du poids Α ſuivant ,& comme cette force eſt égale au poids P, & que O L = O D, on aura , c’eſt-à-dire, que les poids Α P doivent être en raiſon des bras de levier O L, O K, pour être en équilibre.

Mais en démontrant ainſi les propriétés du levier, on tombe dans un inconvénient ; c’eſt qu’on eſt obligé alors de changer le levier droit en un levier recourbé & briſé en ſon point d’appui, comme on le peut voir dans la démonſtration précédente ; de ſorte qu’on ne démontre les propriétés du levier droit à bras inégaux, que par celles du levier courbe, ce qui ne paroît pas être dans l’analogie naturelle. Cependant il faut avouer que cette manière de démontrer les propriétés du levier, eſt peut-être la plus exacte & la plus rigoureuſe de toutes celles qu’on a jamais données.

Quoi qu’il en ſoit, c’eſt une choſe aſſez ſingulière que les propriétés du levier courbe, c’eſt-à-dire, dont les bras ne ſont pas en ligne droite, ſoient plus faciles à démontrer rigoureuſement que celles du levier droit. L’auteur du traité de Dynamique, imprimé à Paris en 1743 (M. d’Alembert), a réduit l’équilibre dans le levier courbe à l’équilibre de deux puiſſances égales & directement oppoſées ; mais comme ces puiſſances égales & oppoſées s’évanouiſſent dans le cas du levier droit, la démonſtration, pour ce dernier cas, ne peut être tirée qu’indirectement du cas général.

Comme la détermination du poids des matières & des produits, avant & après les expériences, eſt la baſe de tout ce qu’on peut faire d’utile & d’exact, en Phyſique & en Chimie, on ne ſauroit y apporter trop d’exactitude. Pour cet effet, on doit donc ſe munir de pluſieurs excellentes balances, dit M. Lavoiſier ; la première doit peſer juſqu’à 15 & 20 livres, ſans fatiguer le fléau, & ſervir à déterminer, à un demi-grain près, le poids des vaiſſeaux ; elles doivent être hors d’un laboratoire, de crainte qu’elles ne ſoient rouillées & gâtées par les acides. Celles de M. Ramſden, dont nous allons donner la deſcription dans cet article, ſont remarquables pour la juſteſſe & pour la préciſion. M. Fortin en a fait à Paris qui ont ces qualités. La ſeconde espèce de balance doit peſer juſqu’à 18 ou 20 onces, à la préciſion du dixième de grain. La troiſième ne doit peſer que juſqu’à un gros, & les 512es de grain y être très-ſenſibles. Une quatrième balance à fléau de fer pour peſer des terrines entières pleines de liquide & des quantités d’eau de 40 à 50 livres à un demi-gros près. Une cinquième ſuſceptible de peſer juſqu’à 8 ou 10 livres, à 12 ou 15 grains près ; enfin une petite balance à la main, peſant environ 1 livre à la préciſion du grain.

Balance de Ramſden. La partie eſſentielle d’une balance eſt le fléau & la manière dont il eſt ſuſpendu. M. Ramſden, dont la ſagacité dans l’invention de nouveaux inſtrumens égale la grande perfection qu’il fait donner à tout ce qu’il fait, en a imaginé une d’une nouvelle forme. Il eſt compoſé de deux cônes tronqués, unis baſe à-baſe (voyez la figure 79) ; la baſe de chaque cône eſt de trois pouces ; la longueur de chacune dans l’axe eſt d’un pied ; l’extrémité tronquée à d’un pouce ; chaque cône a deux diaphragmes, dont l’un eſt placé à demi-pouce de la baſe, & l’autre au tiers du cône.