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perçoit dans un corps la qualité qui lui est analogue ; l’abstraction de la conscience, qui s’exerce sur le principe pensant, et l’abstraction de l’esprit, qui opère principalement par le langage. La première abstraction des sens est naturelle et spontanée ; elle précède la synthèse, qui nous donne la connaissance des corps. Mais l’abstraction ultérieure que nous opérons sur chacune de nos perceptions est due à l’observation, et c’est par elle que nous découvrons dans les qualités des corps les modifications qui sont l’objet des sciences physiques et des arts qui en dérivent. Telle est la distinction que nous découvrons entre les qualités premières et les qualités secondes, l’étendue tangible et l’étendue visible ; entre les diverses formes et les diverses couleurs ; entre la force, le timbre, le ton et les voix dans le son ; entre les directions et les inflexions du mouvement, etc. (Voyez Sensation.)

L’abstraction de la conscience succède à l’abstraction des sens. Elle nous donne les éléments des sciences morales et métaphysiques : par elle, le moi s’ébranche en sujet sensible, sujet actif et sujet pensant, qui toutefois ne peuvent se manifester dans la conscience l’un sans l’autre ; car si l’on excepte les impressions purement organiques et les idées qui semblent naître sans attention et spontanément, il n’est point de sentiment sans acte et sans idée, ni d’idée sans acte et sans sentiment. Voilà pourquoi, outre la faculté productrice des idées que nous divisons en sensation, mémoire, imagination, entendement, jugement, raison, nous trouvons dans toutes les langues des noms de sentiments distingués par la diversité des idées : l’amour de soi, l’amour-propre, la sympathie, la pitié, la bienveillance, l’amitié, l’amour du juste, du vrai, du beau ; et par la tendance que suppose l’amour vers l’objet aimé, les mots de besoins, de désirs, de penchants, de passions, avec leurs divers modes et leurs nuances.

L'esprit s'empare du domaine qui lui est fourni par les