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Histoire d’un paysan.

En intérieur, plusieurs livres sur la tablette de la cheminée. Au centre, Marguerite en train d’écrire sur une petite table.
« Mon bon Michel. » (Page 141.)

Il paraît que de bonnes nouvelles venaient car on criait dehors : « Vive le roi ! » Les carabiniers, des géants alsaciens, riaient dans leurs moustaches, en avalant des cruchons de bière, et disaient :

« Ce n’est pas malheureux qu’en soit tombé d’accord ! »

La joie de tout le monde montrait combien la guerre entre nous aurait fait de peine aux gens ; et naturellement nous autres, en cassant notre croûte et vidant une bouteille de vin, nous étions contents de ne pas être forcés d’en venir aux coups.

Le commandant Gérard était allé voir le maire de la ville, M. Drouin ; et comme les nouvelles de paix se répandaient de plus en plus, au lieu de nous presser, nous restâmes là

jusqu’à onze heures. Alors le maire et la municipalité vinrent nous voir sur la place, pendant qu’on battait le rappel et qu’on reformait les rangs. Le commandant remonta sur son cheval en saluant ces messieurs, et nous repartîmes, tout joyeux de savoir que nous arriverions à Nancy comme pour une fédération, au lieu de la bataille.

Vers quatre heures, nous commencions à découvrir au bord du ciel deux hautes tours grises et quelques vieilles bâtisses. Je pensais : « Est-ce que ce serait déjà Nancy ? » mais je ne pouvais le croire. C’était Saint-Nicolas. Nous continuions à nous en approcher lentement, au milieu de la poussière, quand deux coups sourds retentirent au loin, sur notre droite, dans la plaine ; toute, notre troupe étonnée

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