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Le brigadier Frédéric.

Après nous être serré la main, il fut décidé que nous écouterions les observations de M. l’Oberfœrster en silence, et que moi, comme le plus ancien brigadier, je parlerais pour tous, s’il y avait quelque chose à répondre.

Nous attendîmes encore près d’une demi-heure, car le festin ne finissait pas ; on se gobergeait, on riait, on trinquait, on tapait sur un piano, on chantait la Wacht am Rhein !

Malgré leur vanité singulière, ces gens ne s’étaient pas attendus à de si grandes victoires ; et je crois qu’avec d’autres chefs, malgré les préparatifs et la supériorité du nombre, ils n’auraient pas eu l’occasion de se goberger d’une telle manière.

Enfin sur les deux heures, un Allemand en chapeau de feutre vert garni de trois ou quatre plumes de coq, l’air joyeux et les joues rouges jusqu’aux oreilles, car il sortait de la cuisine, vint nous ouvrir la porte, en disant :

« Vous pouvez entrer. »

Et traversant une grande pièce, nous trouvâmes plus loin M. l’Oberfœrster seul, assis dans un fauteuil au bout d’une longue table encore couverte de dessert et de bouteilles vides,