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Le brigadier Frédéric.

chacun a sa conscience ; je ne donnerai de conseils à personne. »

Et voyant le pauvre Jacob Hepp, père de six petits enfants, les épaules courbées, les bras tombants et les yeux à terre, je m’écriai :

« Allons !… donnons-nous encore une bonne poignée de main, ce sera peut-être la dernière !… Que les vieux souvenirs d’amitié nous suivent partout oh le ciel nous conduira ! »

Plusieurs s’embrassèrent, et dans cet endroit nous nous séparâmes.

Jean Merlin et moi nous prîmes le chemin du Fâlberg ; je ne sais pas ce que firent les autres, s’ils entrèrent nu cabaret ou s’ils retournèrent chez eux.

Quant à nous, tant d’idées nous traversaient l’esprit, que nous marchâmes longtemps sans dire un mot.

Au sortir de Zornstadt, nous remontâmes la côte des Bruyères, jusque sur le plateau du Graufthâl, et tout à coup le soleil perça les nuages, il se mit à briller sur les bois. C’était un coup de soleil magnifique, qui nous fit découvrir à travers les taillis dépouillés, tout au fond de la vallée, la jolie maisonnette où j’avais passé