Page:Erckmann-Chatrian - Le brigadier Frédéric, 1886.djvu/13

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

7
Le brigadier Frédéric.

ment tranquille, pendant que je pipais, que tu n’osais presque pas respirer ; je t’entendais frémir sur la mousse, quand les geais et les grives arrivaient, tournoyant pour voir sous les feuilles, je t’entendais murmurer tout bas :

« En voici !… En voici !… »

Tu ne te possédais plus, jusqu’à l’arrivée du grand nuage des mésanges, qui ne vient guère qu’au petit jour.

Oui, Georges, tout cela faisait ma joie, et j’attendais les vacances peut-être avec autant d’impatience que toi.

Notre petite Marie-Rose aussi se faisait une joie de te revoir bientôt ; elle se dépêchait de tresser de nouvelles nasses et de réparer les mailles des filets rompues l’année d’avant ; mais alors tout était fini, tu ne devais plus revenir, nous le savions bien.

Deux ou trois fois cet imbécile de Calas, qui gardait nos vaches dans la prairie, voyant passer de loin, sur l’autre pente de la vallée, des gens qui se rendaient à Dôsenheim, accourut en criant, la bouche ouverte jusqu’aux oreilles :

« Le voici !… Le voici !… C’est lui… Je l’ai reconnu… il a son paquet sous le bras…