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Le brigadier Frédéric.

res, en leur souhaitant toutes les bonnes choses du monde.

J’évitai de passer auprès de la maison forestière et je descendis la côte du Graufthâl, par la sapinière des roches, m’appuyant sur mon bâton dans les endroits trop escarpés.

Je me rappelle avoir rencontré aux deux tiers du chemin, le vieux Roupp, un délinquant incorrigible, avec sa petite blouse déteinte, la cravate de coton roulée en corde autour de son cou maigre et la hachette à la main.

Il taillait et abattait à tort et à travers tout ce qui se trouvait à sa convenance ; grosses branches, petits sapins, tout y passait ; son fagot magnifique s’étendait en travers du sentier ; et comme je lui criais :

« Vous n’avez donc pas peur des gardes allemands, père Roupp ? »

Il se mit à rire, le menton en galoche, et son morceau de feutre sur la nuque, en se passant la manche sous le nez.

« Ah ! brigadier, fit-il ensuite tout réjoui, ces gens-là ne se hasardent pas seuls au bois !… À moins d’être des régiments, et d’avoir des canons devant eux, des uhlans de tous les côtés et