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Le brigadier Frédéric.

ne voyait rien, les gens se tenaient enfermés chez eux.

Sous la porte de M. l’inspecteur, m’étant arrêté deux minutes pour réfléchir, j’allais monter, quand un grand bel homme en pantalon à la hussarde, la taille serrée dans une redingote à brandebourgs, la casquette verte à galons d’argent un peu sur l’oreille» se mit à descendre l’escalier.

C’était M. d’Arence, toujours droit, les épaules effacées, la barbe brune et le teint frais comme à trente ans ; je le reconnus aussitôt. Sauf la tête grisonnante, il n’était pas changé ; mais lui ne me reconnut pas d’abord ; et seulement quand je lui rappelai son ancien garde Frédéric, il s’écria :

« Comment, c’est vous, mon pauvre Frédéric ! Décidément, nous ne sommes plus jeunes. »

Non, je n’étais plus jeune, et ces derniers mois m’avaient encore vieilli, je le savais bien.

Enfin il fut tout de même content de me voir.

« Montons, dit-il, nous causerons plus à l’aise. »

Et nous montâmes.