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Le brigadier Frédéric.

entrant dans ma chambre, m’éveilla en ouvrant la fenêtre du côté de Dôsenheim.

« Écoute, mon père, dit-elle d’une voix tremblante, écoute ce bruit… Qu’est-ce que c’est ? On n’entend plus que cela dans la vallée !… »

J’écoutai ; c’était un bourdonnement sans fin, qui remplissait la montagne et couvrait de temps en temps le murmure des bois.

Il ne me fallut pas longtemps pour comprendre ce que cela signifiait, et je répondis :

« C’est le bruit du canon !… On se bat à sept ou huit lieues d’ici, du côté de Wcerth ; c’est une grande bataille ! »

Aussitôt Marie-Rose descendit, et m’étant habillé, je la suivis dans la salle en bas, où se trouvait aussi la grand’mère, dont le menton tremblait, et qui me regardait avec des yeux tout ronds.

« Ce n’est rien, leur dis-je, n’ayez pas de crainte ; quoi qu’il arrive, jamais les Allemands ne viendront jusqu’ici, nous avons de trop bons endroits pour défendre nos défilés. »

Mais j’étais bien loin d’avoir confiance moi-même.

Les coups de canon redoublaient quelquefois