Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/148

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IV.   Et pour soutenir cet édifice social croulant, vous trouverez en France des hommes d’un rose-tendre, bien portants, chaudement vêtus, décorés, économes, tracassiers par habitude, libéraux par contenance, agitateurs dans le vide ; — patriotes jusqu’au journal, révolutionnaires jusqu’au club, intrigants, vaniteux, bavards, ergoteurs, avocats, pédants, insupportables ; — des hommes qui fuient la poudre, qui tremblent lorsqu’ils griffonnent une constitution ; — des hommes peureux comme des lièvres, quand ils sont abandonnés à leur propre force, et féroces comme des hyènes, quand ils se sentent soutenus par un maître blasé sur le remords ; — des hommes qui s’estimeront heureux tant que l’Émeute ne secouera pas les devantures de leurs boutiques, qui se croiront libres tant que la police ne fouillera pas leurs comptoirs, et se prétendront indépendants tant qu’on ne les fouettera pas sur la place publique ; — des hommes de cette classe souffreteuse, dernier fruit de la copulation du vieillard Monopole avec l’Europe vénale : des hommes de la Bourgeoisie !

Les Bourgeois !... des gens qui jeûnent toute leur vie de peur de mourir de faim une seule fois ; — des gens à qui l’abstinence tient lieu de bonheur, et la continence de volupté ; — des gens sceptiques en religion, doctrinaires en politique, suisses et juifs au gain, indifférents à tout le reste ; — fils, pères et époux supportables par respect humain ; — des gens rancuniers, sournois, jaspinant sans cesse pour ne jamais rien dire ; — des gens qui éternuent