Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/295

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d’apprendre ? — Parce que les hommes sont les cribles qui tamisent les idées ; parce que plus les civilisations sont avancées, plus les problèmes sont complexes, plus sont nombreux et divisés ceux qu’intéresse leur solution. Dans un creuset, les éléments mis en présence sont réduits en poudre impalpable afin qu’ils puissent se pénétrer plus facilement ; le chimiste en cela copie la Providence fatale. Quand le torrent se précipite au-devant du torrent, quand le nuage embrasse le nuage, l’écume et la foudre divisent la masse des eaux et la masse des airs ; de même par la force des bras et l’éclair des pensées, les foules humaines s’écartent pour laisser libre pénétration aux foules humaines. Tout ce qui se pénètre en effet reçoit et donne, jouit et souffre, est pris de délire et d’expansion infinie, irrésistibles ; la vierge craintive et le jeune homme maladroit, le chêne qui crie et la cognée retentissante, la brique rouge et le feu vertigineux. Tout cela se rapproche, s’étreint, se diffond, se confond ; tout cela répand chaleur, extase, électricité, vitale essence. La vierge devient mère, le bois devient feu, et la brique, maison. Tous les êtres se débattent, se cramponnent longtemps autour du gouffre de la Transformation qui finit par les engloutir. Les peuples sont fascinés comme tous les autres êtres.


VI.   Dans le travail d’enfantement que l’Europe va subir se développeront la chaleur, l’agitation, l’immense rumeur qui accompagnent les fermentations accélérées. Au milieu de ces mille ferments de réforme, on ne reconnaîtra pas une direction qui se distingue entièrement des autres et tende à un but facilement discernable. Vertigineux, inextricable est le pêle-mêle social. Ce qui était au fond remonte à la surface, ce qui flottait redescend. De vaines révoltes s’élèvent des entrailles des peuples et viennent expirer à la surface de la mer humaine, ainsi que des