Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/74

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

distribuées d’après ce contrat ; car les privilèges, créés par cet organisme, se sont étendus, avec le temps, à une majorité d’hommes qui résisteront jusqu’à la mort aux entreprises subversives des minorités. Tant qu’il ne se fera pas d’intervention extérieure, cet ordre se maintiendra donc, malgré son injustice, parce qu’il sera protégé par un ensemble de coutumes que, seule, une invasion peut détruire. — Au contraire, dans un pays comme la Russie, dont les frontières sont indécises, dont le système social, imposé par en haut, n’a jamais pénétré dans les mœurs des populations, dont le gouvernement et la noblesse ne constituent qu’une minorité imperceptible ; dans un tel pays, les idées nouvelles, étant tout à l’avantage des majorités déshéritées, sont tout d’abord adaptées à elles et n’ont pas à triompher d’une coalition d’intérêts préexistants.

Tandis que la race slave grandit à l’Orient de l’Europe, les nations occidentales qui attirent encore, pour un instant, l’attention du monde, se décomposent chaque jour. Tandis que le monde slave s’unifie par le despotisme, le monde germano-latin se dissout par l’anarchie. Tandis que chaque Russe est un soldat qui prend docilement son rang dans l’armée de conquête, chaque civilisé est un propriétaire qui veut conserver son lopin de sol, ou bien encore un philosophe socialiste qui revendique orgueilleusement sa part dans l’œuvre de destruction. Tandis que le Nord en est encore aux guerres de conquêtes, aux conflits de nationalités, nous nous épuisons déjà depuis longtemps dans les guerres civiles, dans le chaos des principes sociaux : nous ne sommes déjà plus capables d’une organisation défensive. Ces tendances opposées ont été démontrées jusqu’à l’évidence dans la dernière grande guerre européenne. L’invasion a pu rouler impunément sur la France ses flots d’hommes barbares, sans qu’il soit sorti des en-