Page:Espinas - La Philosophie sociale du XVIIIe siècle et la Révolution.djvu/228

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

respondant Picard avait attiré à son directeur de nouvelles poursuites ; il avait été encore emprisonné à Paris (2e incarcération), puis libéré, grâce à l’intervention personnelle de Marat. Il avait pu ainsi, dans la fête de la Fédération, figurer en costume d’officier à la tête des délégués de Roye et fonder à Paris le Journal de la Fédération, qui alla jusqu’au second numéro. Mais, à Montdidier, sa fortune politique subit une disgrâce irréparable. Il fut accusé d’avoir substitué un nom à un autre dans un acte de vente d’un bien national, et suspendu comme administrateur. La matérialité du fait n’était pas niable. Babeuf avoue qu’il y a eu là « une erreur, qu’il s’est empressé de rétracter. » Erreur, complaisance ou fraude ? Comme le dossier a disparu, nul ne le saura jamais. Il fut pour la troisième fois arrêté à Amiens, mais s’échappa et vint à Paris (février 1793).

Au milieu de ces déplacements incessants, livré à des occupations politiques multiples, absorbantes[1], de quoi Babeuf avait-il vécu pendant ces trois années ? Peut-être avait-il trouvé quelque profit dans la publication de son journal, auquel la poste — tant les privilèges sont prompts à se reconstituer ! — avait accordé le transport presque gratuit, et aussi dans l’ouverture d’un bureau de consultations verbales qu’il y avait annexé. Maintenant il est à

    niquer, qu’un décret du 1er juillet annula la procédure de la Cour des aides et le renvoya « libre et absous. » « Je ne fus jamais coupable, » ajoute-t-il.

  1. En 1789 il est activement mêlé au débat qui s’élève entre Roye et Montdidier, pour l’obtention du siège du district. En 1790 et 1791 il s’occupe de la question des fiefs, seigneuries, cens et champarts de la commune de Méry, d’une affaire criminelle de la commune de Davenescourt, fonde son journal, plaide deux cents causes en deux mois, pousse les faubourgs de Roye à l’insurrection contre les gabelles, dénonce à Péronne un pacte de famine et une conspiration pour livrer la ville à l’étranger, donne en un mot tous les signes d’une agitation presque pathologique. Il en sera de même jusqu’à la fin.