Aller au contenu

Page:Essai sur la propriété foncière indigène au Sénégal.pdf/22

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
— 17 —

formellement, et il va même jusqu’à mettre en garde l’Administration locale contre une constitution trop hâtive de la propriété individuelle. L’absence de cadastre et la nécessité de conserver aux chefs indigènes, nos protégés, leurs ressources, en même temps que leur autorité, constituent, à son avis, des obstacles sérieux à la consolidation des droits de jouissance.

Enfin, et c’est ici que va éclater sa véritable pensée, le Ministre, à la fin de sa lettre, propose au Gouverneur une organisation assez semblable à celle qui existait jadis en Algérie et qui était connue sous le nom de « Cantonnement ». Il conviendrait, dit-il, de procéder par voie de grands partages territoriaux pouvant se délimiter par des accidents de terrains bien tranchés et fixant nettement la part de l’État et celle des populations indigènes ; celles-ci restant dans leurs zones spéciales soumises aux règles consacrées par les traditions locales. Dans ce cas, les ventes y seraient interdites, mais en même temps, il faudrait modifier le décret du 20 mai 1857, et il ne pourrait, d’ailleurs, être question de créer la propriété individuelle autrement que par voie de concessions dans les zones des biens de l’État.

Il faut donc dire que l’arrêté de 1863 n’a pas touché à la question de l’organisation foncière des pays annexés qui est restée entière et que toute la portée de cet acte a été de faire disparaître une pénalité qui choquait nos mœurs et qui avait le grave défaut de ne frapper qu’un des contractants.

Cela est si vrai et si peu du domaine de l’hypothèse qu’à partir de 1863 on voit l’État concéder des terrains sur lesquels les indigènes avaient des « lougans ». C’est ainsi que le 26 octobre 1864, le Ministre de la Marine accorde à la Compagnie agricole du cap Vert un vaste terrain de 500 hectares à charge par elle de payer une indemnité aux « usufruitiers », reconnaissant ainsi, du moins implicitement, que les indigènes n’avaient pas sur ces terres un droit de propriété.

C’est ainsi encore que le 26 mai 11862, la Compagnie des