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Page:Etienne Falconnet - Oeuvres complètes, tome 1, 1808.djvu/106

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Sa grandeur & la difficulté de lamouvoir ont empêché Fab. Verrucoſus de l’enlever, quand il a tranſporté du même endroit l’Hercule qui eſt au Capitole. Le plus admiré de tous les coloſſes fut celui du Soleil à Rhodes : il avoit été fait par Charès de Lindes, éleve de Lyſippe dont je viens de parler (18). Cette figure avoit ſoixante-dix, coudées de hauteur : elle fut renverſée cinquante-ſix ans après par un tremblement de terre ; mais toute abattue qu’elle eſt, on ne ſauroit s’empêcher de l’admirer. Il y a peu d’hommes qui puiſſent embraſſer ſon pouce ; ſes doigts ſont plus grands que la plupart des ſtatues ; le vuide de ſes membres rompus reſſemble à l’ouverture de vaſtes cavernes. On voit au-dedans des pierres d’une groſſeur extrême, dont le poids l’affermiſſoit sur sa baſe. On dit qu’elle fut achevée en douze ans, & qu’elle coûta trois cents talents que produiſirent les machines de guerre laiſſées par le roi Démétrius, ennuyé de la longueur du ſiege. Il y a dans la même ville cent autres coloſſes plus petits ; mais chacun d’eux ſuffiroit pour illuſtrer quelque lieu que ce fût où il ſeroit placé. Outre ceux-là, il y a cinq coloſſes de dieux faits par Bryaxis. L’Italie a produit auſſi des coloſſes ; car nous voyons dans la bibliotheque du temple d’Auguſte l’Apollon Toſcan, qui a cinquante pieds depuis le pouce ; on ne ſait s’il eſt plus admirable par la beauté du bronze ou par celle du travail (19).