Page:Eugène Le Roy - Carnet de notes d’une excursion de quinze jours en Périgord, 1901.djvu/39

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on passe aux grès houillers de Charpenet, puis à des schistes ardoisiers d’un bleu verdâtre…

Mais avant de continuer, comme je ne veux pas me donner les gants d’être un savant, j’avoue ingénument que j’ai pris tous ces renseignements sur la belle carte géologique de la ligne, dressée par mon excellent ami Ch. D… Ceci dit, je reprends :

À mesure qu’on avance, le vallon se resserre en gorge profonde entre de hauts coteaux abrupts et rocheux, tantôt boisés, d’autres fois dénudés. Au fond de ce ravin sauvage, l’Elle court en bouillonnant sur des lames schisteuses. La pauvre n’est pas gonflée en ce moment ; son bassin n’est pas grand, car elle naît entre Saint-Robert et Ayen, et il y a si longtemps qu’il n’a plu ! Au-dessus de son lit profondément encaissé, passe la ligne, tantôt à droite, tantôt à gauche, coupant le flanc des coteaux en tranchée, les perçant en souterrain, ou franchissant la petite rivière sur un viaduc. Quelquefois, entre deux coteaux couverts de châtaigniers, on aperçoit une colline qui se dresse à l’arrière-plan.

Un petit ruisseau, la Rebeyrolle, vient se jeter dans l’Elle, au pied des ruines de Muratel. À la cime d’un mamelon irrégulier et à pic, se dressent des murailles presque frustes, en moellons de schiste. Ces ruines ont la forme générale d’un ovale irrégulier, de plus de cent mètres, interrompu par une brèche qui permet de pénétrer dans l’enceinte. Une sorte de chemin de ronde entoure les murs, et des fossés à moitié comblés séparent le château de la colline. Du côté de l’Elle, l’ensemble domine des pentes d’une roideur qui m’a terriblement fait souffler un certain jour. Point de porte ni de fenêtres à ce qui reste de cet étrange castel ; quelques meurtrières représentent toutes les ouvertures.

Ruines du château de Muratel

Ainsi que tout vieux château qui se respecte, Muratel a sa légende ; il en a même deux. Comme elles ne sont pas très intéressantes, je ne les rapporterai pas ; j’aime mieux faire connaître ce fait piquant, qu’il y a vingt