Page:Eugène Le Roy - Carnet de notes d’une excursion de quinze jours en Périgord, 1901.djvu/40

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ou trente ans, je ne puis préciser en ce moment, un homme de foi robuste tenta de former une société par actions, pour chercher un prétendu trésor caché dans ces ruines hantées par les oiseaux de nuit.

Le train marche à une modeste allure, dominant le fond du ravin resserré entre des coteaux accidentés d’où sortent des rochers lamelleux. Ça et là sur le bord de l’Elle, une maison, un petit moulin, et au-flanc des coteaux des carrières d’ardoise grossière. Puis aux approches de Villac on entre dans les terrains rouges. À la rencontre de l’Aucherel et de l’Elle, le vallon s’élargit et voici le petit bourg épars sur les derniers contre-forts des coteaux et descendant jusqu’aux prés. De vieilles maisons bâties en grès rouge, et coiffées de toitures aigües en ardoises du pays, d’une curieuse physionomie avec leurs galeries de bois et leurs auvents, s’élèvent sur un renflement du sol, sur un petit plateau, au hasard des accidents de terrain. Au-dessus, les dominant, l’ancien repaire noble de Villac, à peu près ruiné, mais faisant encore un certain effet avec ses terrasses et une tour en assez bon état. Au-dessus encore, comme fond de tableau, des coteaux couverts de châtaigniers. L’aspect de ce petit bourg de Villac est pittoresque et agréable. Avant le chemin de fer personne n’y venait, éloigné qu’il était des grandes voies, et caché dans un pays sauvage entre des hauteurs couvertes de bois. Aussi n’a-t-il rien de banal ; rien si ce n’est maintenant la station d’une blancheur crayeuse, qui jure dans ce paysage aux teintes adoucies.

En quittant Villac, le train suit des fonds boisés et déserts. À mesure qu’on approche du Limousin, l’automne s’accuse plus que dans les pays de Causse. Les feuilles des bois ont déjà pris des teintes jaunes, bistres, grisâtres, et commencent à tapisser les taillis. Puis cette approche s’annonce encore par la nature des essences. Des trembles aux feuilles frissonnantes qu’un souffle va détacher, se mêlent aux chênes ; et dans les massifs, des bouleaux aux feuilles devenues rares, brillent sous leur écorce argentée. Quelquefois, dans une éclaircie, on aperçoit au loin une maison qui disparaît rapidement. Par endroits, un sentier sort des bois et vient s’arrêter au bord de la voie qui l’a coupé. Dans de petites combes, entre deux ondulations de terrain, s’allongent des prés humides, fréquentés à la saison du passage par les bécasses qui viennent, au clair de lune, fouiller le sol de leur long bec.

Le train s’enfonce dans le souterrain de Puy-Redon, et, tout à la sortie, se trouve la station de Coubjours. Depuis Villac, nous sommes dans les grès rouges et nous y serons jusqu’à Hautefort, dont la colline calcaire marque la séparation des deux natures de terrain. La machine siffle et repart, et le train file dans des vallons froids, aux pacages maigres,