Page:Eugène Le Roy - Jacquou le Croquant.djvu/228

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Tandis que nous étions là, on entendait les curés chanter vêpres à pleine voix, comme des gens qui ont pris des forces et qui savent qu’ils se reposeront à table le soir ; mais je n’étais pas bien curieux d’y aller, ni les droles non plus, étant bien où nous étions.

La bouteille ayant été vidée à la troisième tournée, je voulus aller en faire tirer une autre, tant je prenais goût à cette manière de boire après Lina ; alors toutes deux me dirent que j’étais un ivrogne, et que, pour ce qui les touchait, elles ne boiraient plus. Voyant ça, je rapportai la bouteille à l’homme de la barrique, et nous fûmes nous promener à Auriac, tandis qu’on commençait à prêcher.

Les auberges étaient pleines de gens qui buvaient. Ceux-là, c’étaient des gens de la paroisse, qui n’avaient pas grande dévotion pour le saint, et le laissaient pour les étrangers forains, mais qui l’aimaient tout de même, parce qu’il faisait aller le commerce de l’endroit, et qui le fêtaient le verre au poing.

À ce moment, les pétarous, ainsi qu’on appelle ces marchands de fruits des environs de Brives et d’Objat, commençaient à repartir, ayant vidé les bastes de leurs mulets, et rempli de gros sous leurs bourses de cuir. Ceux à qui il restait quelques melons les donnaient pour presque rien à leur auberge, ou aux adroits qui avaient attendu sur le tard pour acheter. Nous nous promenâmes assez longtemps dans le bourg et sur