Page:Eugène Le Roy - L’Année rustique en Périgord, 1921.djvu/35

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La fenaison est moins dure que la fauchaison ; mais pourtant les ardeurs du soleil et les longues journées rendent ce travail pénible, nommément pour les femmes. Les pauvres diablesses, maintenant, jusqu’après la récolte de la Saint-Michel, n’ont guère de repos. Ce n’est plus le temps pour elles d’aller aux foires, tout en faisant leur bas, sous couleur d’acheter du « lien », ou pour un sou d’épingles. De même, leurs hommes n’ont pas trop le loisir d’y aller voir le cours du bétail et chopiner un petit. Aussi, en cette saison et pendant les « métives », les foires ne sont pas suivies comme celles d’hiver ; il n’y a pas autant de « peuple ». C’est pourquoi l’on dit communément que ce sont des « foires de femmes grosses », parce qu’elles ne risquent pas d’y être « pilées » par la foule. Toute la maisonnée, dès à présent, va vivre aux champs, y fera le « merenda » ou collation et ne rentrera à l’ « oustal » qu’à « soleil entré » pour souper et dormir.

Le dimanche même, on remue les foins, on les « barge », c’est-à-dire qu’on les met en meules, et on les rentre aussi pour peu que le temps menace.

C’est vrai que de la « prade » on entend, selon la situation, les cailles chanter dans les blés, ou les seigles épiés qui ondulent au vent avec des reflets argentés ; ou bien un merle siffler dans un hallier ; ou encore dans les bois, un mâle de tourterelle roucouler amoureusement, toutes chansons plaisantes pour les citadins ; mais nos gens de campagne n’y prennent garde, pour les avoir de longtemps accoutumées. L’habitude émousse le plaisir comme la douleur.