Page:Eugène Le Roy - L’Année rustique en Périgord, 1921.djvu/58

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Le maïs, appelé ailleurs blé de Turquie, chez nous blé d’Espagne, et par le paysan blad rouge, ou bigarrouey, fut importé d’Espagne par le Bigorre au xviie siècle ; et, de même que pour la pomme de terre, la culture s’en généralisa très lentement dans notre pays de trantran.

Si le paysan périgordin, en général, répugne aux nouveautés agricoles, le métayer, lui, y est encore plus réfractaire, en raison de son instabilité. Une faible augmentation de récolte éventuelle qui ne changerait pas sa condition ne le fait pas sortir de sa routine ; et, au surplus, il se désintéresse des améliorations durables dont il ne profitera pas. Alors que le paysan maître du sol vit en communion étroite et constante avec la même terre, dans un vrai mariage, le métayer n’a avec elle que des rapports passagers, quelque chose comme une fornication terrienne…

La destinée de celui-ci est d’être errant de domaine en domaine, pauvre toujours, misérable souvent. Cette désolante instabilité le lasse, cette incertitude du lendemain le dégoûte. Les changements de métairie ont lieu ordinairement à la Saint-Jean et à la Saint-Michel, selon les contrées. Rien de plus triste que ces déménagements où se montre à nu la misère de ces pauvres gens. Sur la charrette sont entassées leurs pauvres affaires : vieux châlits, table, bancs, maie, méchant cabinet piqué des vers, paillasses rapiécées, quelques ustensiles de ménage et de mauvaises hardes : le tout ne vaut pas vingt pistoles.

Voilà toute la richesse de cette famille. Ils sont métayers de père en fils depuis ne sais quand.