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Page:Eugène Le Roy - L’Année rustique en Périgord, 1921.djvu/98

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souvent entre parents, eux qui ne boivent jamais de vin ! Pure calomnie, d’ailleurs, car cela ne dépasse pas une grosse gaieté : Le paysan se grise par occasion quelquefois à l’auberge, jamais chez lui.

Ils oublient, ces messieurs, tout ce que l’épargne faite pour fêter ce jour familial, représente de privations antérieures ! Qu’ils laissent donc les pauvres diables festiner un pauvre jour à leur aise. Peut-être ce mardi-gras mangeront-ils du poulet rôti…, rôti non à la broche, ils n’en eurent jamais une, mais au moyen d’une ficelle pendant à la cheminée. Le poulet rôti ! ce rêve culinaire du paysan entres toutes les choses esculentes ! Ce terme de comparaison des excellentes victuailles ; cette suprême expression de la bonne chère, qui revient souvent dans les admonestations des parents aux enfants très friands : On t’en donnera des poulets rôtis !

Le paysan est sobre, patient, travailleur, économe, et point fumellaïre. Il semble que les classes dites supérieures, le calomnient pour avoir le prétexte de le mépriser. Sans doute, il a des défauts, mais ils lui viennent presque tous de sa condition sociale depuis des siècles.

Il est grossier ? incongru ? Mais, qui donc s’est soucié de son éducation ? Ses maîtres ont-ils seulement jamais pensé à l’influence démoralisatrice de l’effroyable promiscuité dans laquelle ils l’ont obligé de vivre de tous temps ?

Il est intéressé ? Mais cela n’est-il pas légitime, lorsqu’un sou représente un morceau de pain nécessaire ?