Page:Eugène Le Roy - L’Ennemi de la mort.djvu/182

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— Ça n’est pas un nom comme ça.

— Ou monsieur de Bretout ?

— Oui, c’est bien ce nom-là… mais il y en a d’autres !

— Celui-là suffit, dit le docteur, en montant à cheval pour aller voir un malade à Saint-Michel.

En route, il se tâtait au sujet de ce mariage. Tout d’abord il constata qu’il l’avait appris sans trouble. Ensuite, après réflexion, ayant bien considéré la chose sous tous les aspects, il se dit qu’à l’heure présente encore il referait ce qu’il avait fait naguère. Tout au plus un petit reste de passion charnelle lui faisait-il regretter un peu de voir cette jolie cousine passer dans les bras d’un autre. Mais ce peu de jalousie physique n’avait aucune amertume, et Daniel se sentait fort capable d’assister souriant à la cérémonie nuptiale.

Satisfait de son examen mental, le docteur avançait d’une allure tranquille, et bénévolement émouchait la Jasse avec une branche de chêne feuillue, quand tout à coup, à un détour du chemin, il vit venir vers lui Minna, sur sa jument, escortée d’un cavalier qui montait un vieux cheval anglais. Ce cavalier était un ci-devant jeune homme de trente à trente-deux ans, grand, osseux, à la figure camuse, rousseau, avec de larges oreilles aplaties comme des poires tapées.

À quatre pas, le docteur salua :

— Bonjour, ma cousine.

— Bonjour, Daniel, fit-elle avec un sourire.

Et ils se croisèrent.

Si la jeune fille avait été seule, peut-être Daniel aurait-il encore été quelque peu maltraité de paroles ; mais elle ne résista pas au plaisir de taquiner son futur, qui l’accompagnait aux vêpres de la Jemaye.