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Page:Eugène Le Roy - La Damnation de Saint Guynefort.djvu/15

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au change et appète préférablement les pommes du voisin, nul ne protesta.

Le jour de la consécration de la petite église de La Noaillette, tous les curés d’alentour venus à la cérémonie, guignèrent la joliette limosine et félicitèrent leur confrère, avec une pointe d’envie. Le vieil abbé de Tourtoirac, l’honora même d’un coup d’œil de regret en se ramentevant sa jeunesse. Mais les prêtresses qui avaient accompagné leurs prêtres, selon l’usage, lui trouvèrent l’air un petit peu beaucoup trop déluré.

Après la consécration de l’église, Guynefort fut mis en la « libre, actuelle et corporelle possession de la cure de La Noaillette, avec tous ses droits, cens, rentes, dîmes et autres revenus dépendant d’icelle. » Le révérend dom Glenadel le prenant par la main, l’introduisit dans l’église et lui remit la clef du portail. En entrant, la corde de la cloche pendant, Guynefort sonna trois coups en l’honneur de la Sainte Trinité ; puis, toujours conduit par le seigneur abbé, il alla au maître autel qu’il baisa, après quoi il fit son oraison à monseigneur Saint-Pierre et lut l’évangile du jour. Cela fait, il en vint à la porrection des vases sacrés, et enfin ayant aspergé et encensé, le clergé, le sire Joffre, les manants, et visité les fonts baptismaux, la prise de possession fut complète et achevée. Procès-verbal fut dressé du tout et signé des principaux assistants.

Une clause du dit procès-verbal, portait que le curé donnait en pur don, exempt de toute simonie, et à jamais, à l’église de La Noaillette, la sainte maille de la chaîne du prince des apôtres. Après avoir été baisée dévotieusement par tous les fidèles, la dite maille fut réintégrée dans un reliquaire de cuivre, offert par le sire Joffre et la damoiselle son épouse.