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Page:Eugène Le Roy - La Damnation de Saint Guynefort.djvu/3

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neuve, et ce n’est pas un saint ordinaire, puisqu’il est damné.

Il est vrai que son collègue du pays de Dombes, n’est pas non plus un saint banal, car il fut en son vivant un chien lévrier. Ce chien ayant été tué injustement d’un coup d’épée par le seigneur son maître, les bonnes gens du pays virent dans la destruction du château de ce maître barbare, qui eut lieu quelque temps après, une punition du ciel. Ce sentiment de justice pitoyable aux bêtes, dégénéra bientôt en un véritable culte en l’honneur du chien martyr. Les mères apportèrent leurs enfants malades sur son tombeau, et il s’y opéra, comme de juste, des guérisons miraculeuses. Quoique plus tard un moine jaloux, Étienne de Bourbon, ait fait déterrer et brûler le corps de ce lévrier Guinefort, il est encore vénéré dans le pays et continue à guérir les enfants, ainsi qu’on le peut voir dans l’Histoire de la Civilisation française, de Monsieur Alfred Rambaud : point ne conte sornettes.

Le saint Guynefort de La Noaillette, n’était pas un chien, lui, mais un homme et même un habile homme, ainsi qu’allez le voir.

En l’an de grâce 1250, l’année même où le roi saint Louis fut pris à la Mansourah, un matin d’avril, les maçons qui construisaient l’églisotte de La Noaillette, virent venir du côté de Chasseins, un homme inconnu qui descendit dans le vallon, traversa le petit ruisseau de la Beuse, sur des pierres mises à l’exprès, et monta le coteau en suivant un chemin qui existe encore, mais tellement creusé par le temps, que les branches des vieilles souches des chênes qui le bordent, se rejoignent au-dessus de la tête du monde qui passe par là.