Page:Eugène Le Roy - Les Gens d’Auberoque, 1907.djvu/17

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Au bout d’une demi-heure, les roues cahotèrent sur un pavé inégal, et la voiture passa sous une vieille porte ogivale à laquelle attenait un pan de mur ruiné, débris de la vieille enceinte de la bourgade. Le voyageur aperçut alors, de chaque côté, de tristes maisons endormies et de méchantes étables. Enfin, après des retours en lacet, des raidillons enlevés à coup de fouet, le lourd véhicule rudement secoué s’arrêta au bas de la place d’Auberoque, devant l’hôtellerie du Cheval-Blanc, dont la porte était grande ouverte.

En descendant de voiture, le jeune homme eut la sensation d’être au pied de quelque gigantesque falaise, et, levant la tête, il entrevit vaguement, tout en haut, au-dessus des maisons étagées, les masses sombres du château d’Auberoque qui se perdaient dans la nuit.

Un grand feu clair brillait dans la cheminée de la cuisine, et, tandis qu’on déchargeait ses bagages, le voyageur se tint debout, le dos au feu. C’était un beau garçon de vingt-huit ans environ, grand, bien fait, brun, qui portait les cheveux coupés ras et une fine moustache légèrement retroussée. Ses yeux noirs, brillants, regardaient bien ouverts, loyalement, et sa figure aux traits réguliers annonçait la force et la franchise.

— Vous n’avez pas dîné, peut-être, monsieur ? demanda, la bienvenue souhaitée, l’hôtesse, plantu-