Page:Eugène Le Roy - Les Gens d’Auberoque, 1907.djvu/300

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il admettait bien qu’on ne fît pas ses pâques, mais non pas qu’on naquît, qu’on se mariât ou qu’on mourût sans curé. À Auberoque, il avait fait « enfouir », comme il disait, en dehors des murs du cimetière, un pauvre diable faible d’esprit, que la misère avait poussé au suicide.

Avec quelle stupeur cet adorateur de l’idole au pied fourchu reçut l’annonce du mariage du receveur, il est aisé de se le figurer. Il n’en revenait pas, et faisait les suppositions les plus fantastiques pour l’expliquer. Un oncle du défunt M. Desvars était autrefois parti pour l’Amérique, et on n’avait plus ouï parler de lui. Le notaire alla s’imaginer que cet oncle avait laissé une grosse fortune, selon la coutume des oncles d’outre-mer, et que M. Lefrancq, en ayant eu fortuitement connaissance, épousait Michelette pour se l’assurer. Mais sa stupeur devint de l’indignation, lorsqu’il apprit que les futurs époux avaient résolu de se passer du curé.

— Un mariage civil à Auberoque ! disait ce fantoche, c’est une honte pour le pays !

« Ton Dieu sera mon Dieu », avait dit Michelette à M. Lefrancq ; et voilà comment le curé Camirat perdait une quarantaine de francs à cet arrangement, ce qui ne lui était pas indifférent.

Heureusement, M. le maire était là pour venger la société outragée. Il était obligé, de par la loi, de marier ces accordés sans principes, mais cela ne