Page:Eugene Simon - La Cité chinoise, 1891.djvu/335

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tendrement. Kouë, c’était son nom, s’aperçut de son chagrin et finit par lui en arracher la confidence entière. Ne rêvant plus dès lors qu’aux moyens de le consoler et de lui rendre le courage, l’idée lui vint d’aller trouver un fameux astrologue et de savoir de lui ce qui avait causé les malheurs de son père et comment en empêcher un nouveau. L’astrologue lui répondit que la prochaine fonte ne réussirait pas mieux que les deux premières, à moins que le sang d’une vierge ne fût répandu dans l’alliage. Pleine d’horreur, mais résolue à se dévouer, ne sachant d’ailleurs de l’Empereur que sa menace, Kouë rentra à la maison ; et, ayant obtenu de son père l’autorisation d’assister à la fonte, elle en attendit le jour. Il arriva ; et voici comment la catastrophe est décrite : Un silence de mort régnait dans l’assemblée au moment où l’on donna passage à la fonte liquide pour qu’elle se rendît dans son moule. Les respirations s’étaient arrêtées ; dans les poitrines oppressées, les cœurs ne battaient plus. Tout à coup Kouë quitte sa place, et, dans le métal sifflant et bouillant, se précipite en s’écriant : « Pour mon père ! » En vain, l’un des assistants s’élance pour la retenir, il ne peut la saisir que par le pied et il ne garde en ses mains qu’une de ses mules. Frénétique de douleur le père veut la suivre, mais on l’arrête et on le reconduit chez lui, ayant complètement perdu la raison. Quant à la prédiction de l’astrologue, elle se vérifia ; jamais on n’avait fondu de cloche aussi par-