Page:Eugene Simon - La Cité chinoise, 1891.djvu/38

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ce n’est pas seulement au riz que le Chinois rend justice, mais à toutes les récoltes, ou pour mieux dire, à la terre elle-même, à la terre qui les produit, au buffle, au bœuf qui aident à ses travaux. Il se dit ces paroles de l’ancienne loi de la Perse: « Fais justice à la plante, au taureau, au cheval ; prends garde que la vache ne mugisse contre toi ; ne sois pas ingrat pour le chien. La terre a droit à la semence ; négligée, elle maudit ; fécondée, remercie. A l’homme qui l’aura remuée de droite à gauche, et de gauche à droite, elle dira : Que tes champs portent tout ce qui est bon à manger ; que tes villages, nombreux, soient abondants en tous bien. » Il se dit encore: « Laboure et sème ; celui qui sème avec pureté accomplit toute la loi. »

La bonne foi, le crédit, sont dans les choses courantes de la vie une autre forme de la justice. Je veux citer quelques faits. Bien souvent, par exemple, dans mes voyages, j’eus à refuser des offres de prêts sans intérêts et sur simple parole que me faisaient des mandarins ou de riches habitants. « Monsieur, me disaient-ils, vous êtes depuis longtemps éloigné de vos compatriotes. Peut-être avez-vous besoin d’argent. Disposez de nous. » Une fois même, il m’arriva de renvoyer à un mandarin une somme de 8,000 francs qu’il avait fait laisser dans un coin obscur de mon logis, bien que j’eusse décliné son obligeance. Je n’était pourtant qu’un étranger, mais cela montre d’autant mieux l’habitude que les Chinois ont du crédit moral. Ce n’est assuré-