Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, II, 1884.djvu/148

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autour de la terre Troienne, jamais mon cœur n’a manqué de bienveillance pour la Ville des Phryges, qui fume maintenant, renversée par la lance Argienne. Le Phôkéen Parnasien Épéios, par l’art de Pallas, a construit un cheval empli d’hommes armés, et il a fait entrer entre les tours ce lourd fléau. De là il sera appelé par les hommes futurs le Cheval lancéen, parce qu’il contenait des lances cachées. Et les Bois sacrés sont déserts, et les temples des Dieux ruissellent de sang, et Priamos est tombé mort au pied de l’autel de Zeus Herkéien ! L’or et les dépouilles des Phryges sont amassés dans les nefs des Akhaiens. Les Hellènes, ayant pris cette Ville, attendent un vent propice pour aller revoir, joyeux, après dix ans, leurs femmes et leurs enfants. Et moi, vaincu par la Déesse Hèra l’Argienne et par Athana, qui toutes deux ont détruit les Phryges, je quitte l’illustre Ilios et mes autels. En effet, quand la morne solitude est dans une Ville, le culte des Dieux souffre, et ils ne sont plus honorés. Le Skamandros retentit des gémissements des captives à qui le sort a donné des maîtres. Les unes sont aux Arkadiens, les autres aux Thessaliens, d’autres aux chefs Thèséides des Athènaiens. Celles des Trôiades qui n’ont pas été atteintes par le sort sont ici sous ces tentes, réservées pour les premiers de l’armée ; et, avec celles-ci, est la Lakainienne Tyndaride Héléna, captive aussi de droit. Et chacun peut voir la misérable Hékabè, étendue devant la porte, répandant des flots de larmes pour beaucoup de causes. Sa fille Polyxénè a péri malheureusement, sans qu’elle l’ait su, sur le tertre funèbre d’Akhilleus. Priamos et ses enfants sont morts ; et la divinatrice Kasandra, que le roi Apollôn a laissé vierge, Agamemnôn l’a traînée de force à un lit adultère, sans respect pour le Dieu et pour