Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, II, 1884.djvu/186

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le plus lâche des hommes, quand tu partis sur ta nef, de Sparta pour la Krètè. Et maintenant, ce n’est plus toi, c’est moi que j’interrogerai sur ce qui suivit. Quelle était ma pensée en suivant cet étranger loin de ma demeure et trahissant ainsi ma patrie ? Demande-le à la Déesse, et sois plus puissant que Zeus qui est l’esclave de celle-ci, bien qu’il commande aux autres Dieux. Je dois donc être pardonnée. Tu peux, ensuite, porter contre moi une accusation plus spécieuse. Après qu’Alexandros fut descendu, mort, sous la terre, et que le mariage imposé divinement n’était plus, il me fallait quitter les demeures et venir aux nefs des Argiens. J’ai tenté de le faire ; les gardes des tours et les sentinelles des murailles m’en sont témoins ! et souvent ils m’ont surprise descendant en secret, à l’aide de cordes, du haut des créneaux, jusqu’à terre. Mais un nouveau mari m’a prise de force, Dèiphobos, et il m’a épousée malgré les Phryges. Comment donc, ô Maître, mourrais-je équitablement, condamnée avec justice par toi, quand celui-ci m’a épousée de force, et quand ma beauté m’a livrée à une dure servitude, au lieu de me valoir le prix de la victoire ? Mais si tu veux l’emporter sur les Dieux, ce que tu veux est insensé.

LE CHŒUR.

Reine, défends tes enfants et ta patrie ! réfute son éloquence, car, si elle parle bien, elle n’en est pas moins malfaisante, et cela est dangereux.

HÉKABÈ.

Je défendrai d’abord les Déesses, et je montrerai qu’elle parle faussement. Je ne pense pas, en effet, que