Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/326

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violente ! par un attentat coupable tu n’as pas craint de porter sur toi-même une main meurtrière. Quelle divinité t’a donc conduite à ta perte ? Ô douleur ! ô supplice plus cruel que tous ceux que mon cœur a soufferts ! Ô fortune ! ton bras s’est appesanti sur ma famille et sur moi. Tache inattendue, imprimée sur ma maison par quelque génie malfaisant, désastre qui fait pour moi de la vie un insupportable fardeau ! Je vois devant moi une mer de malheurs si immense, que je ne saurais jamais y échapper, ni surmonter les flots de l’adversité. Malheureuse femme, quelle funeste destinée ! quelle réponse je reçois de toi en t’abordant ! Tel qu’un oiseau qui s’échappe des mains, tu fuis d’un vol rapide vers la demeure des morts. Hélas ! que je suis à plaindre ! C’est dans le passé que remonte l’origine de cette colère des dieux qui fond sur moi, pour punir les fautes d’un de mes ancêtres.

Le Chœur.

Ô roi, tu n’es pas le seul à qui arrive un pareil malheur ! bien d’autres que toi ont aussi perdu une digne épouse.

Thésée.

Je veux descendre aux enfers, privé de ta douce présence ; je veux mourir, pour habiter avec toi le séjour ténébreux. C’est moi, plus que toi-même, que tu as perdu. Mais qui m’apprendra la cause qui a porté le coup mortel à ton cœur ? M’apprendra-t-on ce qui s’est passé ? ou est-ce en vain que mon palais réunit une foule de serviteurs ? Ah ! quelles douleurs tu me causes ! quel deuil je retrouve dans mon palais ! Qui pourrait le supporter ? qui pourrait l’exprimer ? Ah ! je suis perdu ! ma maison est déserte, et mes enfants sont orphelins. Tu m’as quitté, tu m’as quitté, ô la plus chère et la meilleure