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Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/332

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Et d’abord je commence par le premier reproche que tu as dirigé contre moi, comme pour m’accabler, sans que j’aie rien à répondre. Tu vois l’astre du jour, et la terre ? entre tous ceux qu’elle porte, il n’est point, malgré tes accusations, d’homme plus pur que moi. Je sais avant tout honorer les dieux ; j’ai des amis incapables de faire le mal, et dont l’honneur rougirait de demander de honteux services, ou d’en rendre d’également honteux. Je ne tourne pas mes amis en ridicule, mais je suis le même pour eux, absents ou présents. Enfin, s’il est un crime dont je sois innocent, c’est celui dont tu me crois convaincu. Jusqu’à ce jour, mon corps est resté pur du commerce des femmes ; je ne connais les plaisirs de l’amour que de nom, et par les peintures que j’en ai vues ; et je n’ai aucun goût pour ces spectacles, car j’ai encore la virginité de l’âme. Peut-être ma chasteté ne peut te convaincre ; mais c’est à toi de montrer comment je me suis corrompu. Serait-ce que sa beauté surpassait celle de toutes les femmes ? ou bien espérais-je hériter de ton trône, et te remplacer dans ton lit ? J’aurais été fou, et complètement dépourvu de sens. Diras-tu que la royauté a des charmes ? Nullement pour les sages ; et le pouvoir des rois ne plaît qu’à ceux dont il a corrompu le cœur. Je voudrais vaincre et occuper le premier rang dans les combats de la Grèce ; dans la cité, le second rang me suffît, avec l’amitié des gens de bien, pour être heureux. Ce bonheur est en ma puissance, et l’absence du danger me donne plus de joie que le souverain pouvoir. Sur un seul point j’ai gardé le silence : je t’ai dit tout le reste. Si j’avais un témoin qui pût dire ce que je suis, si je me défendais en présence de Phèdre encore vivante, les faits feraient paraître les coupables à tes recherches. Mais j’en jure par Jupiter, gardien des serments, et par cette terre