Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/40

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le esclave, prends ce vase, et va puiser de l’eau de la mer, pour que je lave dans ce dernier bain le corps de ma fille, à la fois vierge, épouse sans époux, privée du privilège de la virginité (28). Ah ! comment lui rendrais-je des honneurs dignes d’elle ? Hélas ! que puis-je ? mais je ferai ce qui m’est possible. Je recueillerai, pour orner sa tombe, ce que les captives qui habitent avec moi ces tentes ont pu soustraire de leur antique fortune, à l’avidité de leurs nouveaux maîtres. Ô superbes palais ! ô maison jadis florissante ! Ô Priam ! souverain d’un riche et puissant empire, père d’une brillante postérité ! Et moi, malheureuse (29) mère de tant d’enfants, en quel néant sommes-nous tombés, dépouillés de tout ce qui nous rendait si fiers ! Et après cela, nous nous gonflons d’orgueil, l’un de l’opulence de sa maison, l’autre des titres d’honneur que ses concitoyens lui donnent. Tout n’est que néant : nos projets soucieux, la jactance de nos paroles, tout est vanité. Celui-là est le plus heureux, qui n’est pas atteint par le malheur. ( Elle rentre dans la tente des captives. )

LE CHŒUR, SeuI.

[629] Un désastre, une ruine inévitable fut mon partage, le jour où Pâris fit tomber les sapins des forêts de l’Ida, pour s’élancer sur les vagues de la mer, vers la couche d’Hélène, la plus belle des femmes que le soleil éclaire de ses rayons dorés.

La peine, et la nécessité plus puissante que la peine,