Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/449

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Pélée

Ô destin, au dernier terme de la vieillesse, voilà les coups dont tu me frappes ! Comment est-il mort, cet unique enfant de mon unique fils ? Parle : je veux entendre ce récit, quelque pénible qu’il soit à entendre.

le messager

Depuis que nous étions arrivés sur la terre célèbre de Phébus, trois fois le soleil avait achevé sa course brillante, et nous avions donné ce temps à satisfaire notre curiosité ; cela parut suspect, et le peuple de ce pays consacré aux dieux s’assemblait tumultueusement : le fils d’Agamemnon, parcourant la ville, semait sourdement des discours hostiles contre nous. « Voyez, disait-il, cet étranger qui parcourt les grottes du dieu remplies d’or, trésor des mortels ; il vient, pour la seconde fois, dans le dessein qui déjà l’a amené, de piller le temple d’Apollon. » Dès lors cette rumeur dangereuse se répand dans la ville, les magistrats se rassemblent ; ils établissent des gardes dans les conseils, et, en particulier, tous ceux qui ont la charge de veiller sur les trésors sacrés mettent une garde dans le temple entouré de colonnades. Ignorant ce qui se passait, nous étions devant les autels, entourés de brebis nourries dans les bocages touffus du Parnasse ; près de nous étaient nos hôtes et les prophètes de Delphes. L’un d’eux dit à Néoptolème : « Jeune homme, que demanderons-nous au dieu pour toi ? quel est le sujet qui t’amène ? — Je viens, répondit-il, expier une faute que j’ai commise envers Phébus : je lui avais autrefois demandé vengeance du meurtre de mon père. » Mais Oreste fit prévaloir son accusation, que mon maître mentait, et qu’il était venu dans des intentions coupables. Celui-ci s’avance dans le sanctuaire du temple, pour invoquer Apollon en pré-