Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/451

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de clameurs profanes, répétées par les échos. Semblable au calme, mon maître brillait sous ses armes étincelantes, jusqu’à ce que, du milieu du sanctuaire, se fit entendre une voix terrible, effroyable, qui ranima la fureur assoupie et rappela ses ennemis au combat. Alors le fils d’Achille tomba, percé par un habitant de Delphes, qui le fit périr avec beaucoup d’autres. Dès qu’on le vit renversé, ce fut à qui l’atteindrait avec le fer ou avec les pierres, soit de loin, soit de près. Tout son beau corps est défiguré par d’horribles blessures. Ils enlevèrent son cadavre étendu près de l’autel, et le jetèrent hors du temple. Mais nous, aussitôt, nous avons recueilli cette triste dépouille, et nous te l’apportons, ô vieillard, pour que tu l’arroses de tes larmes et que tu l’enfermes dans la tombe. Voilà comment le dieu qui prophétise aux mortels, et qui rend la justice aux hommes, a reçu les expiations du fils d’Achille. Comme un homme méchant, il a fait revivre de vieilles querelles. Comment mériterait-il le nom de sage ?

le chœur

Voici le corps du roi qu’on apporte de la terre de Delphes dans ce palais. Ô malheureuse victime, et toi aussi malheureux vieillard, en quel état faut-il que tu revoies le jeune fils d’Achille ? En le frappant, le sort cruel t’a frappé toi-même.

Pélée

Hélas ! triste objet de douleur que je vois ici, et que mes mains reçoivent dans mon palais ! Hélas ! hélas ! ô ville de Thessalie ! je succombe, je meurs… je n’ai plus de postérité ; il ne me reste plus d’enfants dans ma maison ! Ô trop cruelle destinée ! Vers quel ami tourner mes yeux, pour adoucir l’amertume de ma douleur ? Ô bouche, ô joues, ô mains chéries ! Ah ! pourquoi le destin