Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/481

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nous réduisons les hommes et les cités plus faibles en esclavage : et toi, tu veux secourir ceux qui furent nos ennemis, et donner la sépulture à ceux dont l’insolence a causé la perte ? Ce n’est donc plus justement que le corps de Gapanée, frappé de la foudre, reste fumant sur cette échelle qu’il a dressée contre nos murs, en jurant de les renverser, même contre la volonté des dieux ; ou que la terre entr’ouverte engloutit dans son gouffre le char du devin Amphiaraüs, et que les autres chefs gisent devant nos portes, écrasés sous les rochers qui ont brisé les sutures de leurs os ? Ou vante-toi d’être plus sage que Jupiter, ou conviens que les dieux ont justement puni les méchants. Le sage doit aimer d’abord ses enfants, puis ses parents et sa patrie ; il doit travailler à sa prospérité, et non à sa ruine. La témérité est chose périlleuse dans un chef et dans un pilote : être calme à propos, c’est être habile. Le vrai courage pour moi, c’est la prudence.


LE CHŒUR

C’était assez de Jupiter pour venger vos crimes ; il ne fallait pas encore vous porter à tant d’outrages.


ADRASTE.

Infâme…


THÉSÉE.

Silence, Adraste ; ne prends pas la parole avant moi : ce n’est pas vers toi que ce héraut est envoyé, c’est vers moi ; c’est à moi de lui répondre. J’en viens d’abord au premier point : je ne reconnais pas Créon pour mon maître, et je ne le sais pas assez fort pour contraindre Athènes dans sa conduite : ce serait aller contre le cours naturel des choses, que d’obéir à ses ordres. Ce n’est pas moi qui commence la guerre ; je n’ai pas marché avec les Argiens contre la terre de Cadmus ; mais je crois