Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/517

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ruisseaux ; mais dans ton abreuvoir, auprès de l’antre du Cyclope, où tes petits t’appellent par leurs bêlements. Psitt[1] ! ne veux-tu pas venir de ce côté ? peux-tu fuir ce coteau couvert de rosée ? Ohé ! je vais te lancer une pierre. Reviens, animal aux longues cornes, reviens à l’étable du Cyclope sauvage. Et toi, laisse-moi presser tes mamelles gonflées de lait ; donne-les à tes jeunes agneaux, que tu abandonnes sur leur litière. Ces jeunes petits, qui ont dormi tout le jour, te rappellent par leurs doux bêlements. Quand quitteras-tu les frais pâturages, pour revenir à l’étable, à l’ombre des rochers de l’Etna ? Là, nous n’avons plus Bacchus, ni ses danses, ni les bacchantes armées du thyrse, ni le bruit des tambours frappés au bord d’une onde pure, ni les gouttes précieuses d’une liqueur vermeille, ni les sommets du Nysa[2], fréquenté par les nymphes. Je chante un hymne bachique à Vénus, que je poursuis avec les bacchantes, aux pieds agiles et brillants. Ô Bacchus, dieu que je chéris, où vis-tu solitaire, agitant ta blonde chevelure ? tandis que moi, ton serviteur fidèle, je suis esclave du Cyclope au front percé d’un œil hideux, et que, vêtu de cette peau de bouc, j’erre misérablement loin de toi et de ton amitié.

Silène

[82] Taisez-vous, mes enfants, et dites aux serviteurs de rassembler les troupeaux sous la grotte creusée dans le roc.

Le chœur
  1. Sifflement des bergers pour appeler leurs troupeaux. On le retrouve dans Théocrite.
  2. Montagne de l’Asie, ou de l’Arabie. Quelques-uns même le prennent pour une partie du Parnasse.