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Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/86

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calme. — Pourquoi pleures-tu, ma sœur ? pourquoi caches-tu ta tête sous ton voile ? J’ai honte de te faire partager mes maux, et de l’embarras que mes souffrances causent à une jeune fille. Ah ! que mes douleurs ne flétrissent point ta vie ! Tu n’as fait qu’approuver l’action ; mais c’est moi qui ai versé le sang d’une mère. Mais c’est Apollon que j’accuse, lui qui, après m’avoir poussé à cette action impie, m’a abusé par des promesses qui ne se réalisent pas. Je pense que mon père, si j’avais pu l’interroger en face et lui demander si je devais immoler ma mère, m’aurait conjuré, les mains étendues vers moi, de ne point plonger le fer dans le sein de celle qui m’a donné le jour, puisqu’il n’en recouvrerait pas plus la lumière, et que moi-même j’en devais recueillir tant de maux.

[294] Maintenant, ma sœur, découvre ton visage et retiens tes larmes, malgré la douleur qui nous presse. Quand tu me vois abattu par le découragement, c’est toi qui soutiens et consoles mon âme désespérée ; et lorsque tu gémis, c’est à mon amitié à calmer tes douleurs. Ces secours mutuels honorent ceux qui s’aiment. Cependant, infortunée, rentre dans le palais, livre au sommeil tes paupières fatiguées par une si longue veille, prends quelque nourriture, et plonge ton corps dans une eau salutaire : car si tu viens à me manquer, ou si ton assiduité auprès