Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/88

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faisant apparaître à tes yeux le sang de ta mère, qui renouvelle ton délire ? O désolation, désolation ! Une haute fortune ne peut subsister parmi les mortels : comme un frêle vaisseau dont la tempête a déchiré les voiles, les dieux l’engloutissent dans un abîme de malheurs, aussi dévorant que les flots de la mer orageuse. En effet, quelle autre famille eut jusqu’ici plus de droits à nos hommages que celle de Tantale, issue d’une union divine ?

[348] Mais voici le roi Ménélas qui s’avance. A l’appareil qui l’environne, il est aisé de reconnaître le sang des fils de Tantale.

Ô toi qui conduisis contre la terre de l’Asie une armée de mille vaisseaux, salut : pour toi, la fortune te seconde ; avec l’aide des dieux, tu as obtenu l’objet de tes vœux.

Ménélas

[356] Ô palais, qu’avec plaisir je le revois à mon retour de Troie ! Et cependant ta vue m’arrache des larmes ; car jamais je ne vis aucune autre maison en proie à des calamités plus funestes. En passant devant le promontoire de Malée (15), j’ai appris le destin d’Agamemnon et la mort qu’il a reçue de la main de son épouse. Du sein des flots m’apparut l’oracle des nautoniers, le prophète de Nérée, Glaucus, dieu véridique, qui m’annonça cette nouvelle et me fit entendre ces paroles : « Ménélas, ton frère est mort ; il a succombé dans le bain fatal préparé par son épouse. » Ces mots firent couler mes larmes et celles