Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 2.djvu/398

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bles combats pour ta possession. Qu’ils approchent, s’ils veulent. Je ne démentirai pas la gloire que j’ai conquise devant Troie ; je n’irai pas en Grèce recueillir des reproches de lâcheté ; moi qui ai ravi Achille à Thétis, moi qui ai vu périr Ajax, fils de Télamon, et le fils de Thésée[1], je craindrais de mourir pour sauver mon épouse ? Non certes. Si les dieux sont sages, ils rendent la terre légère au corps des héros qui meurent en combattant, et sur le corps des lâches ils font peser le fardeau d’une masse accablante. Grands dieux, rendez enfin le bonheur à la race de Tantale, et délivrez-la des maux qui la poursuivent.

Hélène.

Ah ! malheureuse ! car tel est toujours mon sort. Ménélas, nous sommes perdus ! je vois sortir du palais la prophétesse Théonoé : les portes s’ouvrent en criant sur leurs gonds. Fuis… Mais que dis-je, fuir ? Présente ou absente, elle sait ton arrivée. Infortunée, tout est perdu ! Tu n’as donc échappé au fer des barbares Phrygiens ; que pour tomber ici sous le fer d’un peuple barbare !


Théonoé, à une des femmes qui l’accompagnent.

Toi, porte devant moi les torches ardentes, et purifie l’air selon les rites sacrés, afin que nous respirions de pures émanations du ciel. Si quelque pied profane a souillé la terre où je marche, que la flamme lustrale en efface l’empreinte, et partout où je passe répandez la vapeur de la poix embrasée[2]. Après avoir rendu hommage aux

  1. On a observé que les fils de Thésée ne moururent point au siège de Troie ; de là plusieurs éditeurs ont proposé de substituer ici le fils de Nestor.
  2. Les prêtres égyptiens, au rapport de Plutarque (sur Isis et Osiris), prenaient soin de purifier l’air qu’ils respiraient ; le matin ils le fai-