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ION.

pêcher de blâmer Apollon ? Abandonner une fille innocente après l’avoir séduite, et laisser mourir l’enfant dont il est le père ! ah ! cette conduite est indigne de toi ; et puisque tu règnes sur les mortels, sois fidèle à la vertu. Les dieux punissent parmi les hommes ceux dont le cœur est pervers : est-il donc juste que, vous qui avez écrit les lois qui nous gouvernent, vous soyez vous-mêmes les violateurs des lois ? S’il arrivait (chose impossible, je le sais, mais je le suppose), s’il arrivait qu’un jour les hommes vous fissent porter la peine de vos violences et de vos criminelles amours, bientôt toi, Apollon, et Neptune, et Jupiter, roi du ciel, vous seriez contraints de dépouiller vos temples pour payer le prix de vos fautes. En vous livrant à vos passions au mépris de la sagesse, vous êtes coupables. Il n’est plus juste d’accuser les hommes, s’ils imitent les vices des dieux, qui leur donnent de si funestes exemples.



Le Chœur
seul.

Toi qui n’as jamais éprouvé les douleurs de l’enfantement, Minerve, ô ma déesse, je t’invoque, toi que Jupiter, aidé du Titan Prométhée, fit naître de son cerveau l’auguste Victoire[1], descends des lambris dorés de l’Olympe, et vole vers le temple de Delphes placé au centre de la terre, où Phébus rend ses oracles, du trépied sacré qu’entourent les danses religieuses. Viens avec la fille de Latone, toutes deux déesses, toutes deux vierges et sœurs d’Apollon, prier le dieu d’accorder à la fille d’Érechthée une fécondité si long-temps désirée.

C’est pour les mortels un gage de prospérité inébranla-

  1. Ces mots désignent encore Minerve, qui avait un temple à Athènes sous ce nom.