Page:Europe (revue mensuelle), n° 98, 02-1931.djvu/103

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une régularité qui surprend. Elle est de courte durée et peut ne pas se répéter pendant toute une nuit. Quelquefois aussi quoique encore général, le beuglement est entremêlé de notes différentes et haché de silences inattendus, dont la longueur n’est jamais la même.

Mais il arrive que le mugissement général d’une seule note épouse l’autre, aux notes variées. C’est la phase la plus belle du concert. Sur le rythme de deux masses qui s’abattent successivement sur l’enclume, les concertistes changent d’instruments pour se répondre à eux-mêmes. L’unité de la symphonie est alors comprise entre les notes moyennes du hautbois et les plus graves du basson. Et dès la première réplique, les musiciens se fâchent. Le dialogue se poursuit sur des tons qui sont une suite de grognements. Il y a des vaincus ; des voix qu’on ramène au silence.

À la fin, tout sombre dans la criaillerie universelle qui est semblable à la surface d’une mer houleuse, avec ses sommets et ses abîmes, et qui constitue la phase la plus longue du concert. Elle est aussi variée, mais point si belle que les trois autres, qu’un seul élan domine.

L’arrivée de l’aube brise, net, tous les instruments. Notre cœur s’arrête aussi.

Le « bœuf des marais », — (booul baltsi), — est un insecte noir, de forme ovale et de la grosseur d’une noix moyenne. Il n’a pas d’antennes.

On ne le connaît bien que pendant les inondations, quand il arrive en masse compacte et vit intensément.

Le matin qui suivit cette nuit, trouva tous les inondés au bord du plateau. L’eau avait deux mètres de haut. On ne voyait plus que le toit des chaumières et les branchages supérieurs des arbres. Les poteaux de télégraphe se distinguaient à peine. C’est tout ce