Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 2.djvu/238

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choses de l’âme et de la vie future a été éteinte. Le sentiment religieux s’est évanoui ; les doctrines rivales ont perdu toute autorité, et leurs partisans, devenus impies et sceptiques, sont tombés dans l’abîme de l’indifférentisme, où ils se sont donné le baiser de paix. Les discussions religieuses ont cessé de toute part, À la nation chinoise tout entière a proclamé cette fameuse formule, dont tout le monde est satisfait : San-kiao, y-kiao, c’est-à-dire : Les trois religions n’en sont qu’une. » Ainsi, tous les Chinois sont à la fois sectateurs de Confucius, de Lao-tze et de Bouddha, ou, pour mieux dire, ils ne sont rien du tout ; ils rejettent tout dogme, toute croyance, pour vivre au gré de leurs instincts plus ou moins dépravés et corrompus. Les lettrés ont seulement conservé un certain engouement pour les livres classiques et les principes moraux de Confucius, que chacun explique à sa fantaisie en invoquant toujours le ly, ou le rationalisme, qui est devenu leur principe général.

Quoiqu’on ait fait table rase des croyances religieuses les anciennes dénominations sont restées, et les Chinois s’en servent encore volontiers ; mais elles ne sont plus qu’un vain signe d’une foi morte, l’épitaphe d’une religion éteinte. Il n’est rien qui caractérise mieux ce scepticisme désolant des Chinois que la formule de politesse que s’adressent des inconnus quand ils veulent se mettre en rapport. Il est d’usage qu’on se demande à quelle sublime religion on appartient. L’un se dit confucéen, l’autre, bouddhiste, un troisième, disciple de Lao-tze, un quatrième, sectateur de Mahomet ; car il existe, en Chine, un grand nombre de musulmans. Chacun fait l’éloge de la religion dont il n’est pas ; la politesse le