Page:Evelyne, Aventure et intrigues d’une miss du grand monde, T1, 1892.djvu/29

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Mon père étant allé chez l’ambassadeur faire connaître notre arrivée à Paris, plusieurs Anglais et Français vinrent nous rendre visite. La première semaine notre maison fut littéralement encombrée de princes, de ducs, de marquis, de comtes, vicomtes, barons, lords, chevaliers et beaucoup d’autres qui désiraient être présentés à la jolie, et riche jeune fille de Sir John C..... Nous fûmes invités à des bals, des dîners, des concerts, des raouts ; nous fûmes même présentés à la cour. J’étais constamment entourée d’une légion d’admirateurs, jeunes et vieux, qui semblaient rivaliser d’ardeur à celui qui me recevrait avec le compliment obligatoire vis à vis de 100,000 livres ou deux millions et demi de francs. Quelle fortune ! comme on me trouvait belle ! Cent vingt cinq mille francs de rente ! Quelle charmante créature ! on pourrait devenir pair de France ! Qu’elle est gracieuse dans ses mouvements ! on serait qualifié pour la députation ! Comme elle parle bien français ! on pourrait avoir de beaux chevaux ! Comme elle danse avec élégance !

Au bois de Boulogne et aux champs Élysées, mon cheval était le centre d’un bataillon de cavaliers nobles et élégants qui tenaient à honneur d’escorter la belle et riche Anglaise, quelques-uns me comparaient à Diane revenant de la chasse, quelques uns à Vénus, d’autres à Minerve, d’autres à Cléopâtre etc. etc, que sais-je ! les uns louaient la beauté de mon cheval, d’autres admiraient l’adresse avec laquelle je le dirigeais, les uns me demandaient l’adresse de mon sellier, d’autres désiraient savoir où j’avais eu ma cravache.