Page:Eyma, Les peaux noires, Lévy, 1857.djvu/233

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qui se glissaient, furtivement le long de la muraille.

— Ils viennent de ce côté, murmura-t -elle ; cachez-moi, et faites qu’ils ne reconnaissent ni vous ni moi.

— Sont-ce des serenos ? demanda André en se plaçant devant sa protégée.

— Si c’étaient des serenos, répondit celle-ci, je ne craindrais rien. Voici, ajouta-t-elle en faisant sonner sa poche gauche, de quoi les rendre sourds, muets et aveugles.

André abaissa son sombrero et assura la liberté des mouvements de son bras droit, au bout duquel brillait son poignard nu. Les deux hommes, en s’approchant du point où étaient André et la femme voilée, qui s’était accroupie autant pour dissimuler sa taille que pour se mieux cacher, les deux hommes, dis-je, quittèrent le bord de la muraille et gagnèrent le milieu de la rue.

Ils feignirent de passer inattentifs et les yeux baissés ; mais leurs regards obliques avaient essayé de deviner le visage que cachaient les bords rabattus du sombrero. Tout ce qu’ils purent apercevoir, ce fut les éclairs que lançait dans l’obscurité la lame du poignard. Ils hâtèrent le pas et tournèrent le coin de la première rue.

— Vous avez donc bien peur de ces hommes ? demanda André.

— J’ai de graves raisons pour cela. Maintenant, séparons-nous ; prenez à droite, moi à gauche.

— Ne redoutez-vous plus rien ?

— Rien. À demain ?

— C’est entendu.

La femme s’échappa en courant, et se perdit bientôt dans l’ombre que les balcons projetaient dans la rue. André s’éloigna après que l’écho des pas de cette mystérieuse messagère eut cessé de résonner dans le silence sonore de la nuit. Il gagna lentement sa demeure.