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LA VIE ET LA MORT DES FÉES

bonheur qu’une élève de Saint-Cyr, patronnée par Mme de Maintenon et présentée à Louis XIV. Les fées elles-mêmes sont françaises, très purement et très agréablement. Elles sont des fées de France, avisées, prudentes, sociables, point fantaisistes à l’excès, modérées comme la plupart de nos paysages. Cartésiennes, a-t-on dit, comme la belle et savante Mme de Grignan ; il y a, paraît-il, toute une philosophie dans la méthode selon laquelle la fée marraine de Cendrillon opère ses métamorphoses, transformant la citrouille en un carrosse qui en conserve la rondeur, le rat en gros cocher qui garde les moustaches de son premier état. Nous savons que les savants donnent l’Égypte comme lieu de naissance aux contes où les chats jouent un rôle ; mais nous songeons que le Chat Botté a peut-être appris quelque chose de tel ingénieux fripon qui sert de valet chez Molière. Des siècles ont travaillé au perfectionnement des marionnettes de Perrault, mais elles ne sont si humaines et si vivantes que parce qu’il a affiné chez elles la ressemblance avec les contemporains qu’il voyait vivre et se mouvoir sous ses yeux.

Dans ce décor et sous ces formules, d’où viennent les personnages mis en jeu ? De très loin, s’il faut en croire les savants et les commentateurs. S’ils ont adopté perruque et fontanges, ils ont aussi, paraît-il, conservé certains accessoires qui rendent leur origine vénérable et lointaine. Ce chaperon rouge, cette pantoufle de vair, cette barbe bleue, cette peau d’âne nous arriveraient de je ne sais quel vestiaire mythologique. Le chaperon rouge ne serait ni plus ni moins que la coiffure de l’aurore. Et la pantoufle de vair chausserait la même aurore, alors qu’elle court dans la rosée du matin, étincelante aux pointes