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LA VIE ET LA MORT DES FÉES

cinthe, jadis enlevée par une bohémienne, et il épousera sa bien-aimée Félicie. Wieland écrivit aussi un Obéron qui lui valut l’éloge de Gœthe et l’admiration de l’Allemagne. Il avait été rechercher le délicieux petit roi de nos chansons de geste et de la féerie Shakespearienne.

Mais, au moment même où Wieland achevait son Obéron, Musæus, au lieu d’aller explorer les féeries étrangères, s’attachait à recueillir celle de la vieille Allemagne. L’Obéron de Wieland date de 1780 ; c’est en 1782 que s’ouvre la série des contes de Musæus à qui nous devons les légendes de Rübezahl.

Rübezahl est un gnome. Il est le prince des gnomes et l’esprit des montagnes. Un jour, d’un sommet, il aperçoit les modifications que le patient travail humain a fait subir aux collines, aux plaines, aux vallées, et il résout de nouer des relations avec les hommes. Il s’engage comme serviteur chez un fermier avare, puis chez un juge inéquitable, et il faut avouer que ses premières expériences de la race humaine nous sont assez défavorables. Cependant, il s’éprend de la belle Emma, fille du roi de Silésie, et il l’enlève, lui donnant un palais merveilleux aux jardins ravissants, et s’offrant à exécuter ses caprices. Emma soupire ; elle aimait la société des jeunes filles, ses compagnes, et l’amour du beau prince Ratibor, voisin de son père ; et, chez le gnome, elle s’ennuie horriblement. Rübezahl, désolé, lui fait présent d’une botte de carottes, en lui octroyant la faculté de les métamorphoser selon sa volonté. Elle transforme les carottes en jeunes filles, pareilles à ses amies ; mais si semblables que ces carottes deviennent alors semblables à de vraies jeunes filles, aux véritables amies d’Emma, elles ne doivent vivre que ce que